Décembre 1606. Trois navires quittèrent Londres avec pour mission d'établir une colonie en Amérique du Nord. Trois cents hommes en tout, espérant que cette aventure leur permettrait de faire fortune rapidement. Parmi eux, le capitaine John Smith, un officier expérimenté ayant notamment prouvé sa bravoure en méditerranée. Après quelques escales aux Antilles, les navires remontèrent toujours plus vers le nord. C'est finalement le 24 mai 1607, sur les cotes de la Virginie que fut officiellement fondée la colonie de Jamestown, baptisée ainsi en l'honneur du roi James. Jusqu'à son retour forcé en Grande Bretagne à l'automne 1609, John Smith fut un des membres les plus importants de la communauté. Aujourd'hui encore, il reste considéré comme un héraut de la colonisation anglaise en Amérique du Nord.

Le projet de Chrisopher Hittinger était au départ assez simple. Son but ? Raconter l'aventure de Smith et de ses camarades en respectant au maximum la réalité historique, loin de toutes les versions romancées proposées habituellement. Certes, Smtih a rencontré Pocahnontas. Il se pourrait même qu'elle lui ait sauvé la vie. Mais point d'histoire d'amour entre eux, on n'est pas chez Disney !

L'histoire de Jamestown, c'est celle d'une installation éprouvante pour des hommes pas du tout préparés à affronter un tel environnement. Il y a d'abord eu la difficile cohabitation avec les indiens, ponctuée d'épisodes très violents. Puis survinrent les dissensions internes, la maladie, la faim, la rudesse du climat... Pour couronner le tout, un incendie ravagea la ville.

L'auteur insiste sur les luttes intestines qui ont gravement mis en danger la cohésion du groupe et sur l'attitude ambiguë des colons vis-à-vis des autochtones. Smith, notamment, n'hésitait pas à utiliser la force si nécessaire et il savait par ailleurs faire preuve de bonne volonté lorsque cela s'avérait utile, surtout quand il avait besoin de indiens pour se procurer de la nourriture. Vous avez-dit opportuniste ?

La vraie originalité de l'album réside dans le style très particulier de l'auteur, fortement influencé par l'œuvre d'Edward Gorey, un illustrateur américain proche des surréalistes. L'éditeur qualifie à juste titre ce style « d'allégorique ». Plutôt que de proposer un trait ultra-réaliste, Hittinger donne à chaque personnage une forme très particulière (voir extrait ci-dessous). Rajouter à cela une absence totale de dialogues (les événements sont uniquement relatés dans des récitatifs), un découpage se limitant à des doubles illustrations pleine page ainsi qu'une utilisation du noir et blanc plutôt anxiogène et vous vous retrouvez avec une sorte d'OVNI inclassable d'un point de vue graphique.

Je ne suis d'ordinaire pas fan de la BD underground, je préfère de loin le classicisme aux expérimentations parfois incontrôlables. Je me suis donc surpris à éprouver un réel plaisir à la lecture de cet album. Sans doute parce que le sujet m'a beaucoup intéressé mais aussi parce que, malgré les apparences, il se dégage du dessin une surprenante cohérence.
jerome60
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le 27 mai 2012

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