"Ce monde de cauchemars c'est la Terre. Oh les criminels! Il les ont fait sauter leurs bombes!"
Jack Kirby est un géant !
Cette péremptoire affirmation est pourtant vraie. Cet artiste né au début du siècle (le XXè…au cas ou) est cité comme un maître, et une inspiration par une armada d’auteurs modernes de comics, Frank Miller dira de lui qu’il est « le père du comics moderne ».
Dans sa carrière au sein des grandes maisons d’éditions telles que Marvel et DC, il va créer un ensemble de personnages destinés à marquer le paysage du genre : Captain America (aux côtés de Joe Simon en 1947), Hulk, les Quatre fantastiques et Thor (avec Stan Lee dans les années 60), ou encore dans les années 70 pour DC, le charismatique vilain Darkseid l’artiste de l’évasion Scott Free, alias Mister Miracle, ainsi qu’une brochette de personnages et un Univers de nouveaux dieux constituant le Quatrième Monde, et enfin pour ce qui nous intéresse aujourd’hui Kamandi en 1972.
Il faut souligner quelles sont les forces qui ont fait de Jack Kirby cette Autorité incontesté du genre Comics, et qui font surement qu’une anthologie de son œuvre se trouve enfin dans la sélection Patrimoine de l’édition 2014 du Festival d’Angoulême.
Tout d’abord, un trait d’un dynamisme rare faisant littéralement jaillir les personnages de leurs cases, la sensation de mouvement qui se dégage d’eux, et l’impression de puissance et d’énergie qui émane de tous ces super-héros. Entre autre autres effets visuels l’utilisation de Splash-pages qui cassent et contrastent avec le travail classique par cases, des lignes fortes pour le mouvement, ou encore les Kirby krackles, sortes de petites boules noires autour des faisceaux d’énergie ou des explosions.
Kamandi arrive plutôt tardivement dans la carrière de l’auteur, et constitue une sorte de synthèse de son art, l’œuvre y trouve une dynamique rare, une action trépidante, et une énergie qui vous videra…au sens propre, car la lecture de Kamandi peut se révéler éprouvante tant tout bouge dans tous les sens, tant l’action est omniprésente et presque sans temps mort.
Kamandi c’est l’histoire du dernier garçon sur Terre, enfin « dernier » pas tout à fait, il faudrait dire dernier garçon conscient et évolué sur Terre. En effet, c’est dans une Amérique post-apocalypse, ayant subit « le Grand Désastre », que se déroule l’histoire (synopsis qui doit beaucoup au film la Planète des singes, succès du Box-Office dès 1968). Une Amérique où les mammifères sont intelligents et conscients, parlent, et ont construits sur les ruines de l’humanité différents empires, et régimes politiques s’affrontant et exploitant comme force de travail et animaux de compagnie, une humanité toute bestiale à peine bonne à s’exprimer par borborygmes.
Vivant depuis sa naissance dans un Bunker, élevé et instruit des connaissances de l’humanité par son Grand-père, Kamandi se voit contraint d’explorer ce « nouveau monde », qui se révélera particulièrement hostile à l’homme, lorsque son grand-père est tué par un Loup qui parle.
Ce sont les aventures de Kamandi à la recherche des ses pairs humains, à la découverte des raisons qui ont poussé l’homme dans les ornières de l’évolution, dans sa quête du retour de l’homme aux commandes de la Terre, et à la rencontre des ses nouveaux habitants, auprès de qui Kamandi trouvera amis (Tuftan, le fils de l’empereur des Tigres César, Fleur et Cœur, deux humaines qui parlent), mentors (Le professeur Canus, et le Docteur Hanuman) et ennemis, que nous raconte ce premier volume, d’une série qui regroupera l’intégralité de la saga en deux volumes.
Ce comics est donc une véritable épopée, un divertissement flamboyant qui, si vous n’êtes pas allergique à la SF kitsch, aux onomatopées en pleine page, aux expressions faciales exagérées, voire grotesques, et aux couleurs primaires éclatantes, vous comblera tant elle va vous offrir voyage et découverte, action et réaction, amusements et déconvenues.