Kimengumi High School par Ninesisters
Le Collège Fou Fou Fou fût une des séries les plus populaires du Club Dorothée. Un succès qui explique probablement la parution française d’un manga qui n’aurait jamais au grand jamais dû sortir du Japon.
En effet, Kimengumi High School est à la base un manga jouant énormément sur les références – aux manga, au cinéma, voire au monde de la musique – et sur les jeux de mots intraduisibles en Français, y compris dans les noms des personnages. Par exemple, une des héroïnes se nomme Uru Chie, ce qui peut se traduire en « ferme ta gueule » ; pour la version française du manga, les traducteurs de chez Tonkam ont joué la facilité en gardant le nom utilisé par AB pour la diffusion de l’anime, à savoir Julie Uru. Plus délicat, un jeune boxeur chétif qui se transforme en combattant impitoyable les nuits de pleine lune ; nommé Ashitano Joe en version originale, en référence à Ashita no Joe, les traducteurs l’ont appelé Leretour Dejoe, nom totalement improbable issu du Retour de Joe, seul avatar de la série arrivé en France à l’époque. Encore plus délicat, le mangaka a parsemé sa série de caricatures d’idoles qui étaient populaires lorsqu’il l’écrivait, totalement inconnues chez nous (et probablement oubliées depuis longtemps au Japon), obligeant Tonkam à les affubler de noms aussi étranges que Hélénesé Gara.
Une grosse partie de l’humour ne survit pas à la traduction et à l’importation. Il en devient même parfois frustrant : souvent, nous sentons qu’il y a un gag, un truc à comprendre, mais impossible de le saisir avec une version française qui fait de son mieux – les traducteurs font preuve de trésors d’imagination – mais ne peut pas non plus réaliser l’impossible.
Kimengumi High School, heureusement, arrive à être drôle sans se reposer uniquement sur les aspects cités plus hauts. Les personnages sont totalement décalés, déjantés, et ont une tendance innée à la bêtise. Mais le résultat est souvent assez lourd. Le manga se lit bien, mais à petites doses car il devient rapidement indigeste. Certains passages, en particulier au début, sont absolument hilarants. C’est malheureusement moins vrai tandis que les tomes défilent ; le mangaka peinant à se renouveler, il recourt de plus en plus à la parodie, replaçant par exemple ses personnages dans l’univers d’Ultraman le temps de quelques chapitres ; un univers que n’importe quel lecteur japonais saura décrypter, tandis que nous ne pouvons exiger d’un lecteur français qu’il reconnaisse une telle référence, fusse-t-elle régulièrement citée par d’autres auteurs (mais jamais de manière aussi frontale).
C’est triste à dire, mais Kimengumi High School n’avait rien à faire sur le marché français. Il mise tout sur l’humour mais en perd la moitié une fois traduit et soumis à un public non Japonais. Ses quelques excellents moments – comme ceux avec Mlle Macaron ou M. Jidai – sont noyés sur l’ensemble des 13 tomes de l’édition française.