J'avoue ne pas être très enthousiaste en général devant le dessin de Ferrandez, et malgré l'intérêt que je porte personnellement à l'histoire de l'Algérie, les "Carnets d'Orient" me tombent facilement des mains. Ce second tome nous offre d'ailleurs une première partie maladroite et assez soporifique, alors que Ferrandez n'arrive pas à trouver la bonne approche pour nous expliquer le contexte historique, politique et sociale de son "Année de Feu", et que nous sommes noyés dans trop d'informations - en elles-mêmes essentielles et passionnantes - mal présentées. Et puis, lorsque à mi-album, débute la tragédie de la révolte des Kabyles, et le cycle de violence qui s'ensuit, entraînant aussi bien les colons que les "indigènes" dans le malheur absolu, "l'Année de Feu" décolle vraiment, nous laissant finalement avec une impression frustrante de n'avoir qu'effleuré un sujet aussi profond, de n'avoir qu'entrevu un drame essentiel pourtant à la compréhension du XXème siècle de la France. Soulignons aussi la parfaite intelligence du paradoxe offert par Ferrandez, celui de la transformation de communards idéalistes en colons brutaux : voici un questionnement qui est loin d'être trivial sur le fonctionnement de la psyché occidentale face aux peuples "inférieurs". [Critique écrite en 2016]