Quand les démons intérieurs prennent vie en noir et blanc

Dans L’Ascension du haut mal, David B. transforme la bande dessinée en séance d’exorcisme familial. C’est à la fois une autobiographie, une descente dans les méandres de la mémoire et un face-à-face avec les démons – réels ou imaginés – qui rongent une famille. En d’autres termes, c’est un voyage graphique où chaque page est à la fois un cri et une caresse.


Le cœur du récit, c’est l’histoire du frère de l’auteur, atteint d’épilepsie, et des efforts désespérés de la famille pour trouver une solution, quitte à frôler les limites du rationnel. Mais L’Ascension du haut mal ne se limite pas à une simple chronique familiale. C’est un labyrinthe émotionnel, où David B. explore les ramifications de cette maladie sur l’unité familiale, sur sa propre enfance et sur sa vision du monde. La maladie devient un monstre tentaculaire qui dévore tout sur son passage, et c’est précisément ce qui rend le récit si puissant.


Visuellement, l’œuvre est un chef-d’œuvre. Le noir et blanc de David B. n’est pas une simple esthétique ; c’est une tempête graphique. Chaque case est une œuvre d’art où le fantastique et le quotidien s’entrelacent. Les motifs se répètent, les formes se déforment, et les ombres envahissent tout, comme les pensées sombres qui hantent l’auteur. Les pages regorgent de symbolisme, de métaphores visuelles, et d’une richesse narrative qui demande à être décryptée.


Le ton est à la fois intime et universel. L’écriture de David B. est directe, parfois crue, mais jamais sensationnaliste. Il raconte les failles, les erreurs et les douleurs de sa famille avec une sincérité désarmante, sans jamais sombrer dans le pathos. Et au milieu de ce chaos émotionnel, il parvient à glisser des touches d’humour noir, comme un clin d’œil à l’absurdité de la vie.


Certes, L’Ascension du haut mal peut paraître dense, parfois presque étouffante dans sa manière de mêler souvenirs, fantasmes et réflexions philosophiques. Mais c’est aussi ce qui fait sa force : c’est une œuvre qui ne se laisse pas consommer d’une traite, mais qui vous hante, vous interpelle, et vous pousse à revenir sur certaines pages, à chercher des réponses là où il n’y en a pas.


En résumé : L’Ascension du haut mal est une montagne à gravir, une exploration sans concession de la douleur, de la famille et de l’imaginaire. Un récit cathartique qui nous rappelle que même les cicatrices les plus profondes peuvent être sublimées en art. Préparez-vous à être secoué, fasciné, et à redescendre de cette ascension avec un regard neuf sur le pouvoir de la bande dessinée.

CinephageAiguise
8

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleures BD des années 2000

Créée

le 6 déc. 2024

Critique lue 2 fois

Critique lue 2 fois

D'autres avis sur L'Ascension du haut mal

L'Ascension du haut mal
amandecherie
10

Critique de L'Ascension du haut mal par amandecherie

Les années 60. Une famille orléanaise comblée avec leurs trois enfants. Jusqu'à ce que Jean-Christophe, l'aîné, contracte l'épilepsie, qu'on appelait Haut Mal au Moyen Age. Au fil des ans, Tito...

le 23 juil. 2010

12 j'aime

1

L'Ascension du haut mal
Nhoj
8

La plupart des gens sont des poulets

La première chose qui nous frappe c'est l'impression d'un énorme travail de mise en forme et d'une forte recherche de création de codes stylistiques inspirés et plutôt originaux. Le dessin parait à...

Par

le 3 févr. 2011

6 j'aime

L'Ascension du haut mal
Cloé_Ahoulou
10

Incontournable

D'une manière générale, j'aime les récits autobiographiques. L'histoire de David.B est particulièrement marquante, premièrement de part son style, cette bande-dessinée est bourrée de cases sur...

le 26 oct. 2014

3 j'aime

Du même critique

L'Iris blanc - Astérix, tome 40
CinephageAiguise
7

Peace, amour et baffes gauloises

Astérix, c’est un peu comme un banquet chez Abraracourcix : on y revient toujours avec plaisir, même si parfois le sanglier est un peu moins savoureux que d’habitude. Avec L’Iris Blanc, Fabcaro prend...

le 31 janv. 2025

4 j'aime

La Serpe d'or - Astérix, tome 2
CinephageAiguise
7

Quand Astérix et Obélix découvrent Lutèce

Avec La Serpe d’or (1962), René Goscinny et Albert Uderzo emmènent Astérix et Obélix dans leur première grande aventure hors du village, direction Lutèce. L’occasion de découvrir que les Gaulois ne...

le 20 déc. 2024

4 j'aime