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Je suis faible. En me baladant du côté des BD, je vois cette superbe couverture, je me sens obligé d'acheter... Le dernier B&M post-Jacobs que j'ai lu était le très décevant Sanctuaire du Gondwana, j'ai complètement zappé les trois ou quatre tomes parus entre deux. Mais comme je suis faible, j'ai acheté celui-là. Et faut reconnaitre qu'elle est sacrément réussie cette couverture, même si elle spoile à mort !

Comme on pouvait s'en douter à la lecture du titre et à la vue de cette couv', l'album se veut une suite à La Marque Jaune, auquel il est constamment (trop ?) fait référence tout au long de l'histoire, y compris par des clins d'œil rigolos comme une pièce de théâtre intitulée The Yellow "M" écrite par un certain E.P. Jacobs... À part ça, il est aussi beaucoup fait référence au Secret de l'Espadon, surtout dans la première moitié de l'album. Tout ceci nous permet de dire que l'album se déroule manifestement vers le début de la chronologie B&M.

Alors concrètement ça donne quoi ? Au niveau du dessin, Antoine Aubin et Étienne Schréder s'en sortent plus qu'honorablement. Évidemment il est toujours difficile de juger le travail d'un repreneur, mais je trouve qu'on retrouve vraiment bien l'ambiance Jacobs, plus que dans les albums de Sente et Juillard par exemple. Il est agréable de voir qu'on peut encore faire de la ligne claire correcte en 2013. Après ça manque un peu de pêche, on a presque l'impression qu'ils se sont bridés, mais la composition des planches et les cadrages sont dans l'ensemble plutôt réussis.

En ce qui concerne l'histoire, il faut commencer par reconnaitre à Jean Dufaux le mérite de n'avoir pas cherché à reproduire l'ambiance de La Marque Jaune, entreprise qui aurait de toute façon été vouée à l'échec, tant l'album de Jacobs est proche de la perfection.
À la place, Dufaux met en place une histoire impliquant plusieurs factions qui veulent reprendre les travaux de Septimus à leur compte, sans en saisir toute la complexité (ce qui est aussi le cas du lecteur !). On va vite se trouver ici confronté au principal défaut de l'histoire : c'est beaucoup trop tordu, et on a parfois bien du mal à saisir où l'auteur veut en venir. Trop de questions restent sans réponse, et je doute que même Dufaux les possède. Malgré tout, la mise en place d'une ambiance très science-fiction, lorgnant presque plus du côté de L'Énigme de l'Atlantide que de La Marque Jaune est plutôt réussie, même si pas assez exploitée. J'ai trouvé la caractérisation de Mortimer très étrange aussi, et j'ai parfois eu du mal à reconnaitre le débonnaire professeur de physique auquel on a été habitués.
On a bien sûr droit à la traditionnelle séquence du souterrain (et même deux pour le prix d'une !). On est content de retrouver Nasir, même s'il ne retrouvera jamais un rôle similaire à celui de l'Espadon. Bonne idée aussi de faire de Mortimer et Olrik des compagnons d'infortune, même si cela se fera au détriment de Blake, très en retrait dans cet album (comme c'était souvent le cas chez Jacobs, certes). On arrive au second principal défaut de cet album : le nombre trop important de personnages et de forces en présence, qui empêche le développement approfondi desdits personnages.
Et il y a bien sûr le fait que tous les éléments de l’histoire, pourtant relativement indépendants au départ, arrivent en même temps, ce qui est beaucoup trop facile pour un scénariste.

En somme un album assez encourageant, tant au niveau du scénar que du dessin, mais qui pèche, peut-être à cause d'une ambition trop grande. Je ne sais pas si une suite est prévue, mais elle serait souhaitable pour répondre aux questions laissées en suspens.