Envie de tout savoir sur l’invention de la plus terrible arme de l’histoire de l’humanité ? La Bombe est faite pour vous. Portée par une recherche historique minutieuse, cette bande dessinée au format de « pavé » en retrace l’histoire, des premières découvertes sur la radioactivité au jour fatidique du 6 août 1945. Les étapes du « projet Manhattan » sont bien entendues racontées avec précision, mais ce sont les épisodes moins connus qui sont sans doute traités avec le plus de brio : l’espionnage entre puissances, la course à l’uranium, les opérations commandos… autant d’exemples d’une formidable course contre la montre aux dimensions planétaires pour détenir l’arme ultime qui viendrait mettre un terme à la 2nde Guerre mondiale. Les considérations morales ne sont pas en reste. Les auteurs s’attachent à montrer comment, une fois la menace d’une bombe atomique nazie ou japonaise écartée, les mêmes scientifiques qui l’ont mise au point s’interrogent. Faut-il vraiment utiliser la Bombe ? Le lecteur assiste à ce terrible renversement qui conduit les Etats-Unis à larguer cette arme, non pour gagner la guerre en cours, mais pour préparer la suivante, qu’on n’appelle pas encore « Guerre froide ». Ces passages sont véritablement prenants, et glaçants. Cependant, d’autres m’ont moins convaincue. A vouloir en dire beaucoup, l’auteur a peut-être voulu en dire trop. Certains dialogues notamment, saturés d’information, sont laborieux à lire. De même le dessin s’il est maîtrisé et précis, parait souvent froid. On touche là selon moi aux limites de l’exercice documentaire : la fameuse règle « show don’t tell » aurait sans doute due être mieux respectée pour me convaincre totalement. Malgré ces quelques reproches, j’ai vraiment pris une claque dans les toutes dernières pages. Le texte et le dessin semblent sortir de leur carcan, l’atome se personnifie en puissance maléfique, le trait se floute, les lignes se distordent, en une magnifique représentation de l’horreur absurde du déchaînement du feu atomique sur Hiroshima. En ces temps troublés où la menace atomique, que l’on croyait disparue avec l’union soviétique, refait surface, ce rappel est indispensable.