Cul et blessures
Pendant que sa prof d’anglais lit Alice au pays des merveilles, Sato regarde par la fenêtre, les yeux perdus dans le vide. Plutôt que de se laisser aller à la rêverie, comme l’héroïne de Lewis...
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le 12 juin 2015
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3
La fille de la plage, (Umibe no onna no ko en vo) est un manga en deux tomes écrit par le célèbre manga-ka Inio Asano, plus connu pour ses titres tels que "Bonne nuit PunPun" ou encore "La fin du monde avant le lever du jour". C'est donc ici un Seinen qui nous raconte l'histoire de Koume Sato, une jeune collégienne qui, après une déception amoureuse plutôt traumatisante, décide de perdre sa virginité auprès de Kosuke Isobe, un camarade de classe assez taciturne, amoureux d'elle depuis leur première année de collège.
Avec un tel résumé vous vous doutez sûrement que comme à son habitude, Asano ne nous sert pas une histoire innocente et toute mignonne. On a ici une histoire vraiment réaliste, autant de part un scénario crédible à tous les niveaux, que des dessins d'une précision bien souvent ahurissante.
Le manga met en scène deux personnages radicalement différents, avec la jeune fille aux allures innocentes et à vie ordinaire, mais qui pourtant ressent un grand vide ; et de l'autre, un garçon renfermés, un peu otaku sur les bords et issu d'une famille totalement éclatée. Ce qui est vraiment intéressants est l'évolution de ces deux personnages par rapport au lecteur et à l'histoire. Au premier abords ils m'ont parus assez détestables (en particulier Koume, avec ses manières d'enfants gâtés profitant un maximum d'Isobe, alors que lui me faisait plus pitié qu'autre chose (d'ailleurs ces sentiments s'inversent au fil de la lecture)) mais on fini irrémédiablement par s'y attacher.
Bien que la relation que partagent Koume et Isobe soit extrêmement malsaines, alternant violentes vannes et partie de jambes en l'air dénuées de sentiments, on sent toute la puissance du réalisme avec ces adolescents inexpérimentés et mal dans leur peau, manquants de confiances en eux tentant de noyer toute leur frustration dans le sexe. Leurs actes peuvent paraitre souvent choquants pour des adolescents (14/15 ans) mais c'est via ces scènes délibérément provocatrices que l'on capte toute la sensibilité du récit ; les personnages ne savent pas ce qu'ils font, essayant de repousser leurs limites juste pour voir jusqu'où ils peuvent aller.
Dans ce manga, l'auteur dépeint (une fois de plus) certains travers de la société japonaise via le côté "rapport à la famille pendant l'adolescence" avec Isobe dont les parents sont toujours absents, et la famille de Koume qui parait parfaite, mais dont les parents idéalisent leur fille qu'ils voient comme "la petite fille pure qu'elle a toujours été" (phrase du manga) ce qui prouvent qu'ils ne la connaissent plus réellement. On a également le côté "prise de risque" typique des adolescents, cherchant à imiter les adultes ; ça fume, ça couche à droite à gauche, ça se bagarre, tout ça pour se sentir vivant et oublier la monotonie de la vie (ce qui me rappelle assez fortement certains aspects de la série "Skins") je précise que l'histoire se passe dans une petite ville portuaire paumée ce qui accentue le côté ennuyeux du contexte.
Au fil de l'histoire les personnages vont subir une évolution radicale quand ils vont comprendre que leurs actes ont des répercutions, et les deux héros vont peu à peu échanger leurs position de dominant/dominé, ce qui va totalement aliéner les sentiments amoureux d'Isobe envers Koume qui va elle même se rendre compte qu'elle s'attache au jeune homme...malheureusement trop tard.
Parlons maintenant de l'esthétique. Rien d'étonnant de ce côté...on a droit à du très beau, avec le style bien défini d'Asano, très réaliste (on note comme toujours sa particularité rare de dessiner des yeux en amandes aux personnages). Et avec les effets de mouvements, de la mer par exemple.
Concernant les scènes de sexe, et bien il y en a évidemment. Beaucoup. Mais comme pour symboliser l'évolution de la maturité des personnages, il y en a de moins en moins au fil des chapitres... c'est également une réussite de ce côté là, car ici le sexe n'est pas beau. Volontairement "trash" à certains moment, il exprime bien la maladresse des personnages. Il n'est pas romantique non plus (contrairement aux scènes de certains mangas comme "Nana" ou encore "Comme elles") mais ne tombe jamais dans le vulgaire, et à contrario avec ce qui est représenté, on a une certaines impression de pureté, grâce aux balances des blancs, comme est également dit dans une autre critique.
En conclusion, on a ici un manga particulièrement riche, que j'ai adoré bien qu'au début m'ayant pas mal rebuté. C'est pour moi un seinen vraiment réussi de part son réalisme et sa narration parfaite. Je le conseille néanmoins à un publique averti (je dirai 15/16 ans minimum) et mature.
En bref, allez lire ce manga, vous passerez un super moment.
P.S : la fin est juste un peu frustrante...
9/10
Harumi
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Créée
le 28 juin 2017
Critique lue 780 fois
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