La Saga de Grimr est une œuvre qui frappe par sa beauté visuelle et son ambiance unique, mais qui, paradoxalement, peut sembler manquer d'originalité dans son traitement narratif.
Ce qui démarre comme une épopée au cœur de l'Islande sauvage, avec des paysages magnifiques et une atmosphère immersive, finit par tomber dans les codes du shonen, au point de rendre certains aspects de l'histoire un peu trop prévisibles.
Grimr, le héros, incarne cet archétype du protagoniste isolé et en quête de reconnaissance, poussé par un destin difficile. Ce côté "outsider" est un point de départ fascinant, surtout dans le cadre historique de l'Islande du XVIIIe siècle, mais il finit par prendre une direction qui ressemble à celle de beaucoup de héros de mangas :
un jeune homme en colère qui veut prouver sa valeur, défiant le sort avec une détermination farouche. On y retrouve donc des éléments familiers des shonen. Des obstacles de taille, un dépassement de soi constant, et des relations intenses mais attendues...
Ce qui atténue l'originalité de l'histoire.
C'est dommage, car La Saga de Grimr a des qualités indéniables, notamment son esthétique riche et l'intensité des émotions qui traversent les pages. L'aspect graphique est un régal pour les yeux, avec des traits dynamiques et une palette de couleurs qui évoque à merveille la rudesse des terres islandaises. C'est un véritable souffle de fraîcheur dans le paysage de la bande dessinée franco-belge, mais l'ombre des récits de mangas plane trop lourdement sur la narration.
La mise en scène est aussi brillante, avec ces nombreuses plongés et contre plongés sur des visages déformés d'expressions fortes et des cadrages cinématographique qui deviennent de plus en plus grandiose au fil de l'histoire. J'ai fini par ne plus m'arrêter de lire avant la fin, malgré la fatigue, l'émotion était trop présente!
Malgré cette familiarité avec le genre shonen, La Saga de Grimr reste une BD marquante, grâce à l'énergie qui se dégage de ses pages et l'émotion brute de ses personnages. C’est une œuvre visuellement puissante, avec une ambiance qui transporte, mais qui aurait gagné à s’affranchir un peu plus des conventions narratives pour laisser toute sa place à l'originalité de son univers. Car au fil des dialogues on entrevois des tonnes de petites légendes qui ont l'air très intéressantes et qui donnent envi de s'intéresser à cette culture!