Une chose est sûre: l’histoire du "Règne" se passe sur Terre. On le sait parce qu’on aperçoit de temps en temps des vestiges de l’Humanité. Un morceau de Tour Eiffel, une cathédrale à l’abandon. Par contre, les hommes ont disparu, tandis que la nature a repris le dessus sur les ruines de notre civilisation. A quelle époque se situe-t-on? Que s’est-il réellement passé? Impossible à dire. Ce qui est certain, par contre, c’est que d’autres espèces ont pris le pouvoir. Des êtres hybrides, ressemblant aux anciennes espèces animales qui vivaient du temps de l’Humanité (des tigres, des lions, des chats, des renards, des sangliers,…), mais marchant sur deux pattes et dotées du sens de la parole. Bref, des êtres à mi-chemin entre l’homme et l’animal. Quant au monde dans lequel ils évoluent, il est plus dangereux que jamais. Alors que l’Humanité a sans doute été balayée par des cataclysmes naturels liés au dérèglement climatique, des puissants déluges continuent à frapper le globe saison après saison, causant destruction et mort sur leur passage et obligeant des populations entières à un exil régulier. L’histoire démarre d’ailleurs au moment où la nouvelle saison des Démons approche. Du coup, tout le monde fuit la cité pour rentrer dans le Shrine. Le seigneur Jason, qui dirige le clan des Arbatach, est à la tête d’un convoi important, dans lequel il embarque sa femme Daphnis et ses trois enfants, mais aussi et surtout plusieurs chariots contenant les nombreuses offrandes qui sont indispensables pour pouvoir entrer dans le Shrine. Le problème, c’est que cette précieuse cargaison intéresse forcément les bandes de pillards, qui se font de plus en plus téméraires. Heureusement, Jason et sa famille peuvent compter sur trois mercenaires prêts à tout pour les protéger : Isaac le tigre, Octavia la guéparde et Pantacrius le bouc.
La sortie du premier volume de la série "Le Règne" est l’un des gros événements BD de ce début d’année. Pourquoi? Parce que les éditions Le Lombard, qui croient beaucoup dans le potentiel de cette nouvelle saga, ont mis les petits plats dans les grands pour le lancement de cet album. Histoire de battre le fer tant qu’il est chaud, la sortie du deuxième tome est d’ailleurs d’ores et déjà programmée pour le mois d’octobre. On peut comprendre leur enthousiasme, car "Le Règne" réunit tous les éléments pour séduire un maximum de lecteurs et s’imposer comme l’un des cartons de 2017. D’un côté, il y a le scénario efficace et rythmé de Sylvain Runberg, déjà connu pour son adaptation réussie de « Millenium », et de l’autre côté, il y a le dessin particulièrement soigné d’Olivier Boiscommun, dont les personnages mi-animaux mi-humains font penser un peu à ceux de Guarnido dans la série "Blacksad". Rajoutez à cela un mélange de récit d’anticipation, de road-movie et de western (après tout, c’est l’histoire d’un convoi de chariots attaqué par des hors-la-loi) et vous obtenez un résultat plus que prometteur. Ce qui séduit surtout dans "Le Règne", ce sont ses personnages. Isaac, Octavia et Pantacrius, les trois mercenaires, forment un trio attachant et complémentaire, et on a hâte d’en découvrir davantage sur leurs parcours et leurs origines. Les personnages secondaires sont eux aussi très réussis. En particulier Jason et Daphnis, parfaits dans leur rôle d’aristocrates dépassés par les événements, ainsi que leurs trois insupportables enfants, dont la bêtise et l’insolence font en permanence courir de grands dangers au convoi. Si Runberg et Boiscommun parviennent à maintenir ce niveau de qualité pour les tomes suivantes, une voie royale s’ouvre pour "Le Règne".
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