Ce que l'on craignait à la lecture du second tome se confirme avec ce "La Tête la Première" qui enthousiasme (sur le plan graphique) et désespère à la fois (sur le plan narration) : "Blast" est plus un exercice de style qu'un grand thriller-métaphysique comme on l'avait espéré un moment. Exercice de style "graphique" donc, parce que Larcenet multiplie ici les audaces, les inventions, et nous livre encore une fois quelques pages sublimes (... enfin, à condition d'aimer le noir !), qui méritent qu'on fasse une pause dans la lecture accélérée de "Blast" pour apprécier son travail. Je parle de lecture accélérée car, curieusement, "Blast" se lit très vite, non pas comme on lirait un polar haletant dont on se hâterait de tourner les pages, non, plutôt comme un bouquin à la fois un peu vide et vaguement ennuyeux, auquel on ne prend pas la peine de donner le temps de s'insinuer dans notre cerveau. A force de tourner en rond et de ne faire avancer ni son scénario, ni ses personnages, englués à perpétuité dans leur misère, leur folie ou leurs haines, c'est selon, Larcenet a fini par nous "aliéner" : la dernière chose dont on a envie, c'est de ressentir la moindre empathie pour Polzà, qui ne véhicule ici plus rien que son propre dégoût (ou celui de Larcenet) de l'humanité. Non, Larcenet n'est pas Céline, et "Blast" traduit surtout sa superficialité, ce qui est parfaitement rédhibitoire quand on a des ambitions "philosophiques". Oh, il reste dans ce troisième tome quelques très beaux passages, quelques belles phrases bien troussées, mais un sentiment diffus de vacuité, de stérilité, de répétition inutile finit par nous envahir. On espère très fort que le quatrième tome de "Blast" soit le dernier. [Critique écrite en 2012]