La Tyrannie - Max Winson, tome 1 par jerome60
Max Winson est un phénomène. Le seul tennisman de l’histoire à avoir remporté tous ses matchs. N°1 mondial depuis 7 ans, 24 titres en grand chelem et 94 tournois gagnés d’affilée. Un gamin au physique de colosse qui ne se pose pas de question, une sorte de robot, programmé pour gagner, cornaqué par un père tyrannique ne lui laissant rien passer. Pourtant le jeune homme semble traîner une mélancolie persistante, une fragilité difficile à cerner.
Il va d’ailleurs suffire d’une interview télé catastrophique pour ébranler le mythe. Le paternel en fait une attaque et Max doit trouver un nouvel entraîneur. Ce sera Andy, un inconnu aux méthodes très particulières qui va le préparer au match le plus compliqué de sa jeune carrière….
Avec ce diptyque, Jérémie Moreau (Le singe de Hartlepool) a voulu faire un shonen à l’envers. Dans Dragon Ball ou Naruto, le héros, chétif, honnête et un poil naïf, devient le plus fort de tous en franchissant les paliers petit à petit alors qu’ici, Max Winson est au sommet dès le départ et il voudrait descendre de son piédestal. En filigrane l’auteur dénonce avec une certaine finesse les méfaits du sport spectacle, de sa médiatisation et de sa proximité avec la pire forme de libéralisme économique. Mais le cœur du propos reste la compétition à outrance qui caractérise notre société, ce besoin d’être meilleur que les autres et cette violence de la victoire qui galvanise les foules. C’est d’ailleurs le reproche que fait une journaliste à Max : « Tu incarnes la compétition sauvage. Pour s’en sortir, il faut écraser son voisin. Il faut être plus fort, plus performant, plus endurant, et pire…
Par rapport au singe de Hartlepool le trait est ici plus relâché, plus nerveux, plus dépouillé. Quelque chose de brut et d’instinctif qui rappelle par moments Bastien Vives. Autant dire que je ne suis pas fan… Par contre, le noir et blanc est sympa et le découpage est super dynamique, avec quelques effets vraiment astucieux et risqués mais toujours très lisibles.
Une bonne surprise. Avec ce premier album solo, Jérémie Moreau s’est lancé sans filet pour dénoncer un modèle social faisant de la recherche de la réussite notre seule raison d’être. Le tout sans passer pour un donneur de leçon rabat joie. Chapeau !