Geluck, j'ai toujours apprécié, mais c'est vrai que quand j'étais plus jeune je ne comprenais pas forcément tous les gags (et aujourd'hui encore il me faut parfois un petit temps de réflexion pour comprendre et il reste quelques rares gags que je n'ai pas encore saisi) . Du coup, je ne lisais pas souvent un album. Là, j'ai décidé de me replonger dans cette saga, même si je n'en ai pas beaucoup (je pense que j'ai autant de numéros que de best-of, c'est dire...). Et me replonger là-dedans, ça me ravive quelques souvenirs. En voici un.


En deuxième année de mon école supérieure d'arts, j'ai eu un prof qui connaissait bien Geluck, du moins c'est ce qu'il a toujours affirmé, et je suppose qu'on peut le croire. Il le vénérait. Il le traitait de génie. Si bien qu'il ne pouvait s'empêcher de le citer à chaque cours. C'était devenu un sujet de petite moquerie à la fin du cours : repérer tous les clins d’œil, toutes les allusions du professeur par rapport à son idole. C'est allé à un point que pendant un moment, sur nos sessions de 4h de cours, il a fini par convaincre son collègue-prof d'organiser un cours d'image sur la dernière demi-heure, pour nous donner une plus grande culture. Le cours n'était pas axé sur Geluck, non, quand même pas, et on a même vu des trucs intéressants, même des trucs d’Égyptiens, vous savez, là, les tags dans les pyramides et compagnie... mais lors de ce cours, il trouvait davantage d'occasion de faire des liens avec Geluck et il consacra même une leçon entière à son ami. Il n'avait pas tort dans ce qu'il disait (la réflexion autour des mots et de l'image), mais son amour débordait vraiment un peu trop à ce sujet-là. Puis, il comprit que les élèves s'en fichaient un peu, surtout qu'on avait déjà un cours consacré à l'histoire de l'image, alors bon, c'était un peu idiot de perdre du temps là-dessus (certains élèves partaient à la pause à cause de ça - entre autres). Cette année-là était quand même terrible au niveau de ce cours supposé créatif. Les élèves détestaient ces deux profs qui ne faisaient jamais de critiques constructives et dont la capacité à enseigner était mise en doute du simple fait qu'ils n'avaient eux-même jamais pratiqué l'art. Je me souviens d'un exercice où l'on devait raconter une histoire où le support devait influencer la narration. Exercice pas facile et un peu bidon étant donné que ce n'était que la deuxième année et qu'on n'avait pas vraiment les moyens de créer des supports dignes de ce nom... j'ai eu l'idée un peu provocatrice de prendre un rouleau de PQ, de le dérouler et de tartiner chaque feuillet d'un peu plus de chocolat avant d'enrouler le tout à nouveau. Une histoire de caca en somme, qui n'était pas sans rappeler les merdes d'artistes. Je fus très surpris de l'enthousiasme des professeurs qui trouvèrent l'idée géniale. Mes congénères et moi-même étions un peu mal à l'aise par rapport à ce succès exagéré. Du coup, je me suis dit que c'était bon, j'vais réussi l'exercice... sauf que la leçon s'étalait sur plusieurs semaines et que les profs espéraient que j'aille plus loin (ou bien est-ce qu'ils ont compris que l'idée était juste nulle mais n'ont pas osé l'avouer)... du coup, au final, ils m'ont mis tout juste la moitié en disant que j'aurais pu faire mieux (bon c'est vrai que les semaines qui ont suivi, j'ai pas mal glandé). Ha quelle jeunesse...


Soit. Ce premier tome de "Le Chat" mets assez bien dans le ton. Geluck, très vite, trouve son système, son concept et ses jeux de mots et d'images envahissent les pages. On se délecte, c'est drôle, on rit, on réfléchit un peu parce que parfois le gag est plus profond qu'il n'en a l'air. Evidemment, il y a des répétitions, parce que ce ne sont jamais que des jeux de mots et d'image, mais Geluck trouve tout de même de nouvelles manières d'exploiter une même image, un même mot. Du coup, cette répétition conceptuelle n'ennuie jamais. Il faut aussi dire qu'il propose plusieurs sortes de gags, qu'il y en a qui sont plus orientés pipi-caca ou autres. Mais c'est très bien rythmé dans ce bouquin qui réunit autant de vieux gags (puisque le bouquin est paru, si je ne me trompe pas, trois ans après que "Le Chat" ait débuté dans "Le Soir") que de récents (par rapport à la sortie de l'album bien entendu).


Graphiquement aussi c'est agréable, l'auteur mélangeant sans complexes vieilleries et nouveautés, on ne s'arrête pas une étape de la vie du Chat, on n'en perçoit donc pas vraiment l'évolution, on la ressent à peine. Mais surtout cela donne un côté brol très agréable, renforcé par le fait que parfois ce sont des gags en strips, parfois il s'agit juste d'une illustration, parfois c'est une page entière, sans oublier les expérimentations qui ne sont pas forcément des gags, mais juste des représentations du chat dans d'autres techniques. Il y a vraiment un très beau travail de mise en page, c'est donc très agréable à lire.


Bref, ce premier tome est déjà une réussite. Geluck est vraiment un bon auteur de BD qui mérite, je pense, qu'on se souvienne de lui après le suicide de son Chat (qui se sera suicidé après la mort de son dessinateur, il le dit lui-même).

Fatpooper
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le 1 avr. 2016

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