Fin du 2nd cycle de cette BD cynique, antilibérale et philosophique à la fois, découverte il y a peu et dévorée en seulement quelques jours. Le héros, pas vraiment sympathique, traine son spleen contemporain de contrat en contrat, en éliminant consciencieusement des gens dont il n'a rien à foutre, parce qu'il a fait le bilan moral de l'humanité il y a belle lurette et qu'il lui semble qu'il n'y a rien à sauver. Malgré tout, un peu à son corps défendant, il laisse des gens l'approcher : jolies nanas, flics usés, narcos sympathiques... ça finirait presque par ressembler à une vie sociale embryonnaire. Intrigant, ce contremploi. Et puis, évidemment, il y a cette intrigue politico-financière complexe, entre Cuba, le Mexique, le Vénézuela et les États-Unis. Ça ce complique à vue d’œil et ça tient la route, d'un strict point de vue géopolitique. Et ça donne l'occasion au scénariste de citer Castro, Ortega y Gasset ou Hemingway, selon les chapitres. Au final, ça ressemble à un gros manifeste anti-mondialisation mâtiné d'antilibéralisme hargneux. Cela ne pouvait que me plaire. L'évolution graphique est également intéressante, à mesure que le dessinateur lâche son bras, joue avec son ordinateur, prend quelques risques, fait plus vite pour les personnages tandis qu'il s'attarde davantage sur les décors. Au final, les planches y gagnent en réalisme et en densité, l'ambition graphique est patente, et le parti-pris qui consiste à ne laisser que le Tueur dans sa version originelle, plutôt dépouillée, voire quasiment anonyme, me semble plutôt bien vu. Je recommande chaudement.