Joli hommage, graphiquement besogneux.

Le découpage des pages et le scénario sont parfaits : on se doute de la trame principale, mais on prend plaisir à suivre tous ces petits tics des Blake et Mortimer : ce côté roman photo, ces suspenses faciles en fin de page, ces cartons aux précisions maniaques, ces vannes légères sur le côté engoncé britannique, et tous ces ressorts scénaristiques improbables (usurpation d'identité, mystérieuses disparitions, retournements de situation étranges).

En prime, on a des allusions à la trilogie fondatrice de l'Espadon, et l'on retrouve avec bonheur certains personnages secondaires. Le méchant est un nazi, c'est parfait. Les décors sont parfaitement dieselpunk, un pur bonheur.

J'insiste sur le fait que j'ai pris un grand plaisir à lire cet album. Alors, pourquoi pas 10 ? ou 9 ? ou même 8 ?

Parce qu'il n'y a pas ces incroyables illustrations pleine page que l'on prend tant plaisir à contempler. Et de manière plus générale, car les dissonances graphiques qui étaient déjà visibles dans La machination Voronov sont toujours là : oui, les visages copient consciencieusement la ligne claire de Jacobs, un vrai décalque, mais l'insertion des personnages dans les décors, leurs postures, leurs proportions sont parfois terriblement maladroites (regardez la position des mains de Mortimer lorsqu'il sort en force de sa jeep, on dirait une erreur de débutant).

Cet album est très fidèle à l'univers de Jacobs, j'adhère à toute la trame scénaristique, mais graphiquement, c'est un simple ersatz qui fait pâle figure. On y prend tout de même plaisir.

(Cette BD est le dernier cadeau de noël que m'a fait mon frère avant de mourir à 33 ans dans un accident de montagne).