Depuis la mort d'Edgar P. Jacobs, les reprises de Blake et Mortimer ont pu offrir quelques tomes de grandes qualités, mais ça reste assez inconstant, et on ne sait jamais vraiment à quoi s'entendre. Le Dernier Pharaon représente lui une assez bonne surprise, sachant nous surprendre et prendre des risques autour de cet iconique et attachant duo.
L'un des aspects qui frappe le plus une fois que l'on a terminé la lecture, c'est la plongée dans un Bruxelles d'abord mystérieux, puis glacial et limite apocalyptique et vide. On suit des personnages plus âgés et principalement Mortimer, les traits sont connus mais bien détaillés, à l'image d'un scénario assez poussé et recherché, faisant appel au Mystère de la Grande Pyramide et apportant suspense, événements étranges ou encore lien fascinant avec l'Histoire.
Sans donner l'impression d'être tout à fait abouti (mise en place un peu trop rapide, dernière partie assez vite expédiées, il aurait même pu être fait en deux tomes), Le Dernier Pharaon n'en reste pas moins une (petite) réussite. Il le doit aussi au climat instauré, mystérieux et fascinant, donnant même parfois l'impression de vivre la fin du monde, et on prend plaisir à suivre les étapes qui vont mener Mortimer jusqu'au fin mot de l'histoire, avec un aller retour à Londres, des cauchemars effrayants et une armée toujours prête à prendre le pas lorsque la science est dans l'impasse.
Evidemment, tout n'est pas parfait, quelques détails dans l'histoire ou les dialogues peuvent être sujet à discussion, sans pour autant que ça ne gâche le plaisir de la lecture. Cédant pour la première fois à l'aspect hors-série, Blake et Mortimer propose aussi une innovation plus qu'intéressante dans les dessins, François Schuiten débordant de bonnes idées (dans les ombres, les arrières-plans, les visages, la ville décimée ...), se montrant minutieux et en osmose avec les thématiques et le climat mystérieux entourant cet épisode.
Nous faisant suivre un Mortimer hanté, vieilli et coincé dans son passé, Le Dernier Pharaon permet à Blake et Mortimer de proposer une nouvelle aventure assez fascinante, où le mystère est total, et dont on peut oublier les quelques failles pour se plonger dans un Bruxelles apocalyptique et parfaitement dessiné, avec un soin tout particulier pour les détails.