Le Grand A
6.3
Le Grand A

BD franco-belge de Xavier Betaucourt et Jean-Luc Loyer (2016)

Le grand A, incursion dans une fourmilière au rythme des courses!

Critique et extraits sur: http://branchesculture.com/2016/02/04/critique-bd-le-grand-a-betaucourt-loyer/


Décidément, après avoir sorti les pelles et les bouées dans Vive la marée, les éditions Futuropolis, par le biais de leurs talentueux auteurs, continuent de scruter les petits théâtres de notre quotidien. Tout en nous enrichissant sur le dos de nos petites manies. Cette fois, c’est dans un monstre géant bien incontournable que nous emmènent Jean-Luc Loyer et Xavier Bétaucourt: le centre commercial! Dans les rayons du Grand A, grande surface fictive et pourtant bien réelle, une chose est sûre, vous ne verrez plus jamais vos courses comme avant après avoir lu cette enquête.


C’est un rituel irrémédiable de nos vies. Chaque semaine, au moins, il faut y passer, galvaniser le caddie de multiples achats et se délester d’une coquette somme à la caisse. Les courses, ça s’improvise rarement et mieux vaut y être préparé. Ainsi à l’heure où nos élus veulent tous un centre-commerciale pour leurs si nobles villes, nos deux téméraires auteurs n’y vont pas par quatre chemins pour évoquer l’un de nos passe-temps les plus évidents tout en n’étant pas des plus grisants. Loin de la superficialité, dans Le grand A, le décryptage se fait en profondeur, derrière les rayons du visible pour mieux expliquer comment, chaque jour que le monde fait, les magasins ont des produits à nous proposer jusqu’à satiété.


Mais, il est aussi question de l’évolution de cette figure imparable de nos villes depuis les années 70. Des enfants et adolescents qui y voyaient un temple des jeux et des possibles tel un véritable parc d’attraction aux mères de famille qui ont vite accepté cette nouvelle manière de remplir le frigo. Sans oublier les premiers gérants, pionniers devant l’éternel et ne rechignant rien pour faire de leur centre un lieu phare où se bousculent les pères Noël, les événements pour asseoir le grand magasin comme nouvelle église au centre du village, de la ville, et même de la terre. Aujourd’hui, le temps de courses nous phagocyterait 195 jours de nos vies, à raison d’1h20 par semaine.


Forçant les rencontres pour accrocher beaucoup de portraits à ce qui demeure comme une galerie impressionnantes des chevilles ouvrières d’un supermarché, les deux auteurs dressent le portrait majeur de cette galerie commerciale qui ne mesure pas ses efforts pour toujours être à la pointe de l’achat. Pas flatteur pour un sou mais sans non plus faire le portrait d’un diable, le Grand A rend à taille humaine et de lecteur un microcosme bien étudié en ne révélant peut-être pas tous ses secrets mais en en donnant à voir beaucoup d’entre eux: l’histoire du pain qui se conserve moins bien quand il est acheté en rayon, l’évolution du caddie, l’incroyable baisse de prix des poulets ou même le suivi d’un voleur « à l’étalage ».


Le tout est appuyé de chiffres et de théories sans éluder les questions d’avenir et une certaine prise de position: le discours sans aucune originalité des élus visant à doter leur ville d’un centre commercial risque bien d’enterrer les petits commerçants du coeur de ville comme cela a déjà pu se passer par le passé. Affaire à suivre. En attendant, il y a ce roman graphique aussi bouillonnante que l’enquête qu’il livre est passionnante!

Alexis_Seny
7
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le 5 févr. 2016

Critique lue 309 fois

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Alexis Seny

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