Le journal du lutin par Messiaenique
Depuis l'apparition des blogs, de nombreux artistes sont parvenus à toucher un large public, quel que soit la nature de leur talent. Les années 2000 ont notamment été propices au développement d'une quantité d'excellents sites de web comics. Un phénomène venu directement des États-Unis, bien évidemment. Mais notre fière BD franco-belge a su trouver de nouveaux noms pour redorer le blason numérique et perpétrer la tradition à travers les écrans d'ordinateur. Le chemin aura été long. Passées les « boîtes à cartoons » du magazine Spirou, pas facile de tomber sur ce genre de mini-sketches un brin corrosif. C'est devenu maintenant monnaie courante. Parmi les plus connus, on pourra citer le proactif Boulet ou le regretté Frantico, dont on peut retrouver les aventures en format « physique ». C'est aussi le cas d'une charmante bande dessinée dont je vais parler rapidement ici, Le journal du lutin par Victor d'Allan Barte.
Sous la plume de Barte, dessinateur remarqué par Lewis Trondheim, Victor nous raconte ses exploits quotidiens sur son cahier scolaire, du haut de ses huit ans : de tâches d'encre en fautes d'orthographes, on découvre sa famille, ses copains et son école. Pour autant, ne vous laissez pas tromper par le style ultra-simpliste des dessins et le sentiment de pure naïveté qui pourrait s'en dégager : avec toute la cruauté d'un gamin de son âge, le personnage de Victor enchaîne les commentaires grossiers, les crasses, les mauvais coups et les gestes déplacés. Et très franchement, la plupart du temps, c'est hilarant.
Les sketches se divisent en quatre « cases » – disons plutôt en quatre dessins sur du papier grands carreaux. Le design style bac-à-sable de cette BD est très réussi, le souci du détail fait sourire. De l'étiquette centrale jusqu'aux tables de multiplication en quatrième de couverture, tout est fait pour donner l'impression d'avoir vraiment trouvé ce genre de journal intime dans un casier d'école primaire. C'est d'ailleurs ce qui fait la force et le charme de ce livret.
Entendons-nous bien, le style est particulier. On pourrait dire qu'il flirte avec les pâquerettes. Toutes les chutes ne se valent pas ; mais là encore, c'est un bon point pour l'auteur qui va jusqu'au bout de son idée. Pour vous forger une opinion, Allan Barte avait poursuivi les aventures de Victor sur Internet après la parution de cet album et d'un second volume. Vous trouverez suffisamment de planches satisfaire votre curiosité en allant sur le site de La vie du lutin ; cependant, les derniers billets sont loin d'être fantastiques et ne me semblent pas conseillés pour découvrir ce petit garnement.
En bref, on est loin du chef-d'œuvre. En revanche question légèreté, pardon : c'était une petite réussite à sa sortie. Dommage que l'auteur soit tombé en panne d'inspiration et que l'idée se soit épuisée si vite.
http://offthebeatentracklists.wordpress.com/2012/04/15/allan-barte-journal-du-lutin