Toujours aussi apparentés à ceux de Borges, les procédés fétiches de Marc-Antoine Mathieu se manifestent ici sous la forme de vingt-cinq doubles pages cartonnées, en noir et blanc naturellement, qui reproduisent la quatrième et la première de couverture d’autant de livres imaginaires. Le vingt-sixième, c’est donc le Livre des livres, le seul de l’ouvrage à avoir un dos ; d’ailleurs, j’aurais bien vu pour ce volume un système qui permît de le refermer de vingt-six façons différences, un peu comme le sixième Julius Corentin Acquefacques s’il n’avait pas eu de couverture cartonnée, ou à la rigueur un genre de classeur, à la manière de Mille milliards de poèmes.
Les divers auteurs présentés sont des anagrammes de « Marc-Antoine Mathieu » : avec le Livre des livres comme ailleurs, M-A.M. joue avec le lecteur. Autre exemple : certaines des couvertures imaginaires présentées se rapportent à d’authentiques maisons d’édition, soit par anagramme (« Culte d’or », « Si l’on osait ça », etc.), soit autrement (le graphisme des « Paf » / PUF). Du coup, je me suis demandé si les éditions « Sèmes » ou « Démissionnons » étaient des références à quelque chose d’existant que je n’aurais pas su résoudre, ou simplement de fausses pistes.
D’une manière générale, le travail de Marc-Antoine Mathieu regorge tellement d’allusions que ça en devient ludique : on imagine assez bien quel genre d’ouvrages peuvent être Ontologie de la bédé 17 : Structure de la bulle (un essai théorique où l’érudition se fait cuistrerie contextuelle) ou le Nocher des flaches (sorte de roman de terroir au lexique maniéré), et on comprend assez bien quel peut être l’avis de l’auteur sur une telle littérature.