Le cadre du " Passager du Polarlys " est tiré de l'expérience vécue de Simenon, qui a bien voyagé sur ce navire norvégien. On se demande si Christian Cailleaux n'en a pas fait de même tant sa mise en images de ce huis-clos maritime dans les années 30 est d'un réalisme parfait, que ce soit aussi bien dans la restitution de la période Années Folles (mentalités, comportements, vêtements) que dans le périple du Polarlys (le bâteau, la mer, les éléments, les paysages). Grâce aux ombres sur les visages, aux postures, aux drapés, il donne aux protagonistes du drame une épaisseur, une présence et une intensité sans égales.
Rédigé juste avant d'entamer ses Maigret, le capitaine du Polarlys est une préfiguration frappante du commissaire belge, avec son assurance de taiseux, sa virilité bravache, son leadership paternaliste. On pourra trouver au choix que l'intrigue est délicieusement surannée ou une réussite dans le genre de ces romans policiers à la mode à cette époque : "Le Passager du Polarlys aurait pu être un Mort sur le Nil version Iceberg" écrit José-Louis Bocquet dans une postface copieuse et passionnante.