Depuis quelques années se développent de nombreuses bande-dessinées autobiographiques ou d’auto-fiction sur la maladie et le handicap. On pense à « La parenthèse », « Mal de mère », « Ce n’est pas toi que j’attendais » et plein d’autres. Ces ouvrages sont des témoignages dont la portée doit permettre à la société de prendre en compte les souffrances de certains. Espé publie « Le perroquet », qui traite d’un enfant dont la mère souffre de troubles bipolaires à tendance schizophrénique. Le tout pèse 160 page et est publié chez Glénat.
Bastien a 8 ans. C’est l’angle qu’a choisi Espé pour raconter l’histoire. Il est donc spectateur de la maladie de sa mère. À aucun moment il ne peut réellement agir. Il voit ce qu’il se passe et souffre des situations. En effet, sa mère a des crises particulièrement violentes et multiplie les passages en établissement spécialisé. Parfois, elle semble aller mieux. Parfois elle est abrutie de médicaments.
L’auteur construit son ouvrage sous forme de chapitres. Cela engendre une lecture un peu décousue. Chaque chapitre relate un moment ou une description d’un personnage. Sur la fin, la narration se fait chronologique. Cette narration m’a gêné, me donnant l’impression d’un recueil d’anecdotes, comme quelqu’un qui me raconterait l’histoire de sa mère par ses crises. L’ensemble est glaçant, mais la vue par l’enfant met de côté l’aspect documentaire (au sens positif) de la maladie. Sa mère est malade depuis sa naissance. On n’en saura pas plus. L’histoire est centrée sur deux années de crises. Il n’y a pas vraiment d’évolution de la maladie. On ne voit pas Bastien prendre conscience petit à petit de la maladie de sa mère.
Cependant, les yeux de Bastien permettent un peu de respiration dans l’ouvrage. En effet, les quelques scènes avec ses copains amènent un peu de légèreté par leur naïveté. Mais la narration, omniprésente, m’a laissé très extérieur à ce qui se passait. Parfois, le silence en dit plus qu’un long discours et Espé peut se reposer sur son dessin. Je n’ai pas été ému par l’ouvrage, l’observant en retrait malgré tout ce qu’il s’y passe. C’est un sentiment étrange que de le lire une existence aussi difficile pour un enfant et de ne pas être touché émotionnellement.
Au niveau du dessin, Espé évite tout réalisme et c’est très bien. Le trait est plus enfantin, adapté à son personnage. Le choix de la bichromie lui permet de faire exploser les scènes de crise, d’un rouge intense. Lorsqu’il dessine la mère en pleine crise, c’est poignant. On sent la souffrance qui ressort des pages.
« Le perroquet » est une bande dessinée dure, un témoignage fort sur une maladie qui touche une famille bien au-delà de la personne concernée. Mais la narration par l’enfant et par saynètes m’a peu convaincu et laissé extérieur à ce qu’il se passait. Cela reste une lecture nécessaire à ceux que le sujet intéresse ou interpelle.