Le dessin souvent bicolore (bleu et noir, vert et noir, rouge et noir) n'est pas très beau et il n'a pas à l'être car cette histoire n'est pas très belle puisqu'elle raconte quelque chose qui est sans doute parmi ce qui peut arriver de pire pour un enfant (outre sévices diverses et variées), à savoir avoir une mère malade.
Mais la maladie de la mère de Bastien n'est pas visible au premier abord, elle est partout et insidieuse. Elle se déclenche par crises successives, de plus en plus fortes, de plus en plus intenses, de plus en plus vives, le tout sous les yeux d'un enfant de huit ans.
C'est ça la tristesse absolue de l'ouvrage c'est d'adopter le point de vue du gamin qui voit sa mère diminuer petit à petit ce qui l'empêche de remplir son rôle de mère... Tous les moments les plus joyeux sont systématiques cassés par la maladie, par une crise... Une manière de montrer qu'elle est là partout, tout le temps et comme Bastien on sait que l’accalmie ne va pas durer longtemps, que ce n'est que le calme avant la tempête.
C'est donc un réel déchirement à lui, surtout que c'est inspiré de la vie de l'auteur et que cette maladie existe.
Le découpage de l'album en tout petits chapitres qui se terminent quasiment systématiquement par une crise de la mère de Bastien ne fait que renforcer cette impression d'inéluctabilité et de détresse.
Une des séquences les plus touchantes reste pour moi celle avec l'inspecteur de la sécurité sociale à la recherche d'éventuels fraudeurs et qui part du principe que la mère de Bastien, parce qu'en dépression, serait forcément en train de frauder... Sauf qu'elle ne fait pas semblant... elle ne mentait pas... On voit ensuite toute la compassion de l'inspecteur pourtant si malveillant au départ.
Parce que malgré la tristesse absolue de l'ouvrage il reste néanmoins une profonde tendresse.