Un piano vaut mieux qu’un discours pour rapprocher deux cultures

Critique et extraits: http://branchesculture.com/2015/10/25/critique-le-piano-oriental-zeina-abirached/


C'est un petit bijou qui s'entend peut être en fonction de votre imagination mais se lit surtout, qui est paru aux Éditions Casterman, il y a quelques semaines. Avec Le piano oriental, Zeina Abirached continue d'explorer le Liban de son enfance au gré d'une nostalgie souriante mais aussi des notes de l'invention de son grand-père: un piano qui mariait avec élégance musique à l'orientale et musique à l'occidentale. Plus de cinquante ans plus tard, traduit en roman graphique, l'air est toujours aussi beau, musical et poétique.


Ce matin-là, c'est un matin comme les autres, radieux comme le Liban des années soixante peut en offrir de si beaux. De quoi mettre Abdallah Kamanja de bien bonne humeur, entre les fleurs qui tapissent sa chambre et le chant de l'oiseau dont la cage est posée sur l'étagère. Une belle journée s'annonce, commencée au son des couinements de ses chaussures à l'italienne flambant neuve! D'autant plus que, supplément de bonheur, Abdallah a reçu une lettre et - devinez quoi! - son piano, son modeste mais unique piano, a tapé dans l'oeil du célèbre atelier Hofman. Abdallah est attendu à Vienne!


45 ans plus tard, ce n'est pas à Vienne mais à Paris que se trame la vie de Zeina. Récemment arrivée de Beyrouth à Paris avec 23 kilos pour résumer 23 ans d'une vie dans un pays qu'elle ne reverra pas de si tôt; "Zenzen" va apprendre à devoir faire avec une autre culture. Confronter l'image de la France qu'elle avait dans ses livres d'école au Liban, exotique et paisible; et celle bien réelle des rues qu'elle va désormais fréquenter.


À 50 ans d'intervalle, c'est bien la même histoire, intergénérationnelle, que Zeina Abirached raconte ici: celle de deux cultures, en apparence si différentes, qui cohabitent quitte à ne faire plus qu'une. Et quitte à avoir l'air de "deux mikados en vrac dans une tête" bien pleine. Ou d'une sonorité si particulière émanant d'un piano peu banal. Zeina nous fait jouer le jeu des différences et des rapprochements tout en faisant de son roman graphique, une oeuvre intensément visuelle et ...sonore, même, par la force qu'elle met dans le langage dessiné.


Avec beaucoup d'images et beaucoup de vivacité, l'auteur libanaise nous fait part, à nouveau, d'un peu d'elle-même. Elle nous confie un peu de son héritage avec beaucoup de créativité pour mieux nous entraîner dans son monde si gai, noir et blanc et pourtant haut en couleur. Chaque dessin, chaque planche ou double-planche, est une fresque fourmillant de détails, de métaphore. C'est poétique, peut-être pas nécessaire mais essentiel. Comme quelques notes d'un piano qui rendrait l'existence plus légère, un piano qui n'a existé qu'en un seul exemplaire mais passe un peu plus dans la postérité grâce à une héritière qui sublime ses gammes.

Alexis_Seny
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le 25 oct. 2015

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Alexis Seny

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