David Sala n’écrit pas une simple bande dessinée. Non, il peint, il sculpte, il fait vibrer chaque case comme si Gustav Klimt avait décidé de raconter l’histoire de ses grands-parents résistants. Le Poids des héros, c’est du velours et du plomb, du doré éclatant et du gris cendré.
Dès les premières pages, on sent qu’on ne va pas juste lire une histoire, mais la porter sur les épaules. Sala plonge dans sa propre mémoire familiale, et avec lui, on s’immerge dans une époque où l’Histoire ne laissait pas vraiment le choix entre héros et victimes. Ça parle de guerre, de résistance, d’exil, et surtout de ce que ça fait à un gamin de grandir dans l’ombre de figures aussi lourdes que des statues soviétiques.
Graphiquement, c’est un choc. Explosion de couleurs, motifs hypnotiques, compositions qui flirtent avec l’Art Nouveau, on est à mille lieues du documentaire historique classique. Ici, chaque planche est une œuvre en soi, une mosaïque vivante qui donne autant à voir qu’à ressentir. Les visages des héros sont figés dans une grandeur tragique, tandis que le jeune narrateur, lui, tente de se frayer un chemin entre admiration et écrasement.
Et c’est là toute la force du récit : ce poids des héros, ce n’est pas qu’une expression. C’est une pression, une attente, une espèce de dette invisible qu’on traîne sans trop savoir comment l’honorer. Sala nous montre cette transmission du passé, parfois lumineuse, parfois écrasante, avec une justesse qui prend aux tripes.
Bref, Le Poids des héros, c’est une fresque mémorielle entre rêve et cauchemar, un livre où chaque page pèse lourd, mais où l’émotion nous soulève.