• Ingrid ! Annulez tous mes rapports jusqu'à nouvel ordre et trouvez-moi Brazil. Branchez-le en vidéo si vous pouvez. Pas d'enregistrement ni de magnétoscope : c'est Top Secret !

  • À vos ordres. Contact, mon colonel. Vous avez Brazil sur la quatre. Il était chez lui...

  • Je prends. Coupez, mon petit. Désolé, vous ne pouvez pas écouter. Allô, Bruno. Vous êtes relevé de toutes vos missions en cours, mon vieux. Cramponnez-vous, je vais vous annoncer une nouvelle dynamite !

  • Je crois, hélas ! Que je la connais, mon colonel... Nous ne sommes pas les seuls professionnels aux réflexes rapides, j'en ai peur...



Journal de Tintin numéro 3/67 édition belge publie le 17 janvier 1967 une mini-histoire en cinq planches intitulée : '' Une Fleur pour cible '', mettant en avant le fameux Bruno Brazil par William Vance. Michel Greg en quête d'une nouvelle génération de lecteurs par le prisme d'un nouveau personnage qui s'émanciperait des clichés habituels est intéressé par ce protagoniste inspiré par le James Bond à succès avec Sean Connery. Un potentiel à certainement exploiter, c'est pourquoi à partir du 27 février 1967 jusqu'à la fin de l'année, Bruno Brazil revient dans quatre nouvelles mini-histoires supplémentaires : '' Piège sous globe '', '' Réseau diamant '', '' Le Bouclier de verre '' et '' Les Poupées ont la vie dure. '' Le résultat est à la hauteur de l'initiative puisque cette mini-saga se classe durant la même année dans le top 10 du classement des meilleurs succès du Journal de Tintin. Galvanisé par ces retours très positifs Michel Greg décide d'offrir une place de choix à Bruno Brazil en lui offrant sa première grande aventure le 12 mars 1968 avec : '' Le Requin qui mourut deux fois. '' Pour ce faire, Michel Greg refait appel à William Vance avec qui il formera un duo solide qui offrira à ses lecteurs un développement à la hauteur pour ce personnage énigmatique qui durant cinq mini-aventures aura gardé secret ses activités.


Le Requin qui mourut deux fois en tant que premier tome de la saga Bruno Brazil se présente comme une histoire d'espionnage policière intelligemment creusée qui va permettre de dépeindre au maximum l'univers de l'ombre des services secrets. Le Colonel Lazarus D.Walsh, cerveau des '' Services '', l'organisation la plus secrète de défense internationale, fait appel à son meilleur agent '' Bruno Brazil '', après que Kurt Schellenburg, le loup de Nuremberg (nom de code : '' Requin ''), du service de '' récupération et répartition des métaux précieux et bijoux '' du 3e Reich, considéré comme mort depuis 25 ans, soit ressuscité aux yeux du monde après un accident de la route qui l'envoie à l'hôpital National, au service des urgences. Censé être mort lors de sa tentative de fuite de l'Europe 25 ans plus tôt en 45 à bord d'un U-BOOT (sous-marin de la '' Kriegsmarine '' allemande) chargé de richesses évaluées à 15 milliards de dollars, direction le Caraguay en Amérique du Sud où il fut coulé. Une fortune perdue au fond de l'océan dont seul Kurt Schellenburg connaît l'emplacement. S'ensuit une course-poursuite au Costa Negra où des agents secrets venant de plusieurs pays veulent mettre la main sur Schellenburg afin d'empocher les fameux 15 milliards de dollars. À peine arrivé à Costa Negra que les hostilités commencent entre les différents services.


Un récit qui explore, sous différentes rubriques, le monde du renseignement et plus précisément celui de l'espionnage, à travers une intrigue efficace sur les faux-semblants, les jeux de dupes et la maîtrise des informations qui valorisent et favorisent le développement et la compréhension de cet univers mystérieux et confidentiel qu'est l'espionnage. On découvre les nombreux noms de codes et autres fausses identités de couvertures avec un Bruno Brazil infiltré en tant que Roger Blake, homme d'affaires surmené en congé de détente à Costa Negra, qui entre-temps changera encore d'identité en tant que Manuel Garcia, plongeur-pêcheur. Il est accompagné d'un agent encore novice : " Hawks ", infiltré en tant qu'Elmer Puddle, négociant en lingerie pour hommes. On explore également de manière plus vaste le monde des espions avec des agents venant de tous horizons comme le '' Loup Blanc, Wilhelm Van Cleef '' des services de contre-espionnage autrichien. L'action est encore assez sage avec une exposition à la violence maîtrisée où les morts ne sont pas encore pleinement assumés. Les rebondissements sont plus ou moins engageants dans les confrontations avec un manque de mordant heureusement rattrapé par une ambiance haletante offrant un juste rattrapage par le mélange entre les péripéties et le suspense. Le final s'avère un peu décevant avec une conclusion anti-climatique qui néanmoins a le mérite de passer la source d'information et de communication comme l'arme principale dans le monde de l'espionnage.


Les dessins de William Vance sont excellents. Un style ultra-réaliste avec une justesse du trait saisissant qui colle parfaitement avec le récit proposé. Une mise en page habilement menée avec des décors détaillés à l'architecture sophistiquée auquel s'ajoute des personnages superbement modelés. Certaines vignettes méritent le détour comme lors de la scène de plonger, la fuite à la gare Estacion Principal qui se termine par une course-poursuite en voiture agréable. Des graphismes modernes qui apportent à cette bande-dessinée une apparence digne pour accueillir le monde des services secrets dans une mouvance hollywoodienne jusqu'à la superbe couverture. L'imprégnation à l'univers James Bond est bien présent à commencer par les personnages. Bruno Brazil l'agent le plus diplomate des services et considéré comme le meilleur en matière de renseignements et d'intervention. Bruno Brazil s'éloigne de l'archétype des héros du Journal de Tintin auquel il arrive peu de malheurs tant il peut compter sur sa chance, son invincibilité et son infaillibilité. C'est un homme d'expérience qui va se retrouver plus d'une fois mis à terre et qui va douter. Un James Bond made in Sean Connery dans l'âme (toutefois faillible) à la chevelure blanche que William Vance a donné à son personnage afin qu'il puisse être immédiatement reconnu par le lecteur. Une approche judicieuse participant au charme de Bruno Brazil qui vient également faire hommage au personnage '' Bernard Prince '' de Michel Greg. Le Colonel Lazarus D.Walsh rappelle grandement l'illustre '' M '' de l'univers Bondien, jusqu'à sa secrétaire '' Ingrid '' qui est une Money-Penny détournée. Le service '' K '' pour ne pas dire '' Q '' spécialisé dans le matériel dernier cri vient également créer un fort lien entre les deux franchises, avec à la place du vieux Q l'agent Véra, qui est de meilleure compagnie par sa grâce.



CONCLUSION :



Avec Bruno Brazil tome 1 : Le Requin qui mourut deux fois, le duo Michel Greg - William Vance propose une relecture Bondienne à travers un récit contemporain d'espionnage qui ne manque pas de surprendre les lecteurs par le ton sérieux du livre dilué sous une ambiance mature par le biais de dessins réalistes. Une belle tentative pour le Journal de Tintin qui sous la direction de Michel Greg aura vu naître Bruno Brazil, un agent secret élégant qui vient insuffler un vent nouveau en bousculant les archétypes de l'époque.


Une première aventure encore loin du génie que représente cette remarquable saga, mais qui a le mérite de présenter avec efficacité l'univers en filigrane de l'espionnage.




  • Bien entendu, vos valises ont été préparées par le service K. Vous y trouverez tout le matériel dernier cri...

  • C'est ça ! On va encore se raser avec des lance-torpilles miniatures !


B_Jérémy
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le 24 févr. 2022

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