Parcourant la blanche immensité d'un hiver éternel et glacé...
... d'un bout à l'autre de la planète, roule un train qui jamais ne s'arrête. Les premiers mots du Transperceneige plantent admirablement le décor. Amasser les derniers survivants de l'humanité dans un immense train piégé au coeur d'un blizzard, quelle idée géniale ! Cela nous change des habituelles étendues désertiques post-apo, hein ? Evidemment, ce qu'il reste de la civilisation a accouché d'une société inégalitaire où les pouilleux s'entassent en queue de convois, dans l'obscurité, et où les puissants jouissent d'un luxe relatif dans les "wagons dorés". L'aventure commence justement avec la tentative quasi-désespérée d'un "queutard" parvenu à remonter le train par l'extérieur...
Le Transperceneige est constitué de deux parties :
- un premier volume publié en 1984 (scénario de Lob et dessin de Rochette)
- deux autres volumes publiés entre 1999 et 2000 (Legrand remplace Lob au scénario, le dessin évolue vers style proche du crayonné, perso j'aime moins)
J'avoue avoir une nette préférence pour le tome 1 qui, d'ailleurs, pourrait se suffire à lui-même. Les tomes suivants ont néanmoins le mérite d'explorer davantage l'univers en introduisant un second train, un conseil de dirigeants peu scrupuleux et les fameux arpenteurs, ces hommes en scaphandres chargés d'explorer les vestiges glacés du monde.
Au lieu de s'appesantir sur les raisons du cataclysme (une bombe climatique) ou sur le rôle initial de Transperceneige (un train de loisir), la bande-dessinée se concentre sur les moyens de survie et sur les enjeux de pouvoir au sein de cette étrange arche de Noé. Les tomes 2 et 3 vont plus loin en décrivant une société maintenue sous contrôle à coups de sermons télévisés et de vacances virtuelles. Comme vous pouvez l'imaginer, le cynisme enveloppe toute l'oeuvre mais l'humour et la poésie évitent de tomber dans un trop-plein de noirceur.
Après l'excellence du premier tome, on est certes un poil déçu par la suite, juste "bonne", mais la trilogie vaut le coup dans son ensemble, ne serait-ce que pour l'inventivité de son univers. Vivement l'adaptation de Bong Joon-ho !
Note : quand cette critique a été écrite, il n'y avait qu'une seule fiche pour Le Transperceneige. Elle vaut donc pour la série complète. Le 8/10, en revanche, ne concerne que le tome 1. J'ai mis 6/10 aux deux autres.