Les Carnets de l’Apothicaire avaient out pour me séduire sur le papier. Une fresque historique exotique, des intrigues de cour, une héroïne atypique qui devra utiliser ses connaissances en médecine pour résoudre des mystères et complots… Tout cela promettait une œuvre riche et complexe tout en pouvant être grand public.


Une fois la lecture commencé un premier constat doit se faire, le dessin est vraiment fade. Non pas qu’il soit mauvais, mais il est simplement sans aucun caractère, trop lisse en sans détails. C’est au final la pire critique que l’on puisse faire à un dessin, même un dessin médiocre mais authentique comme celui de Hisayama dans L’Attaque des Titans marquera toujours le lecteur qu’un style aussi impersonnel que celui-ci.


Passer cette première déconvenue, les premiers chapitres donnent comme même le change, ou en tout cas l’illusion. Il faut dire que le personnage de Mao Mao est tout de suite engageant : un personnage féminin qui a une apparence plutôt banale et qui doit mettre à profit son intelligence pour s’en sortir. La première affaire qu’elle doit résoudre par rapport aux décès suspects des enfants des concubines de l’empereur donne le ton. Le manga semble alors savoir utiliser à bon escient ses thématiques en mélangeant humour et maturité. Malheureusement, à mesure que les chapitres passent, le manga va trahir une par une presque toutes les promesses qu’il nous avait faite.


J’avais commencé par pointé que le premier point qui caractérisé le plus Mao Mao était son physique. Cela reste superficiel, mais faire en sorte que l’héroïne principale soit moins bien habillée et moins « séduisante » que le reste des nobles est logique, mais comme même un parti pris pour ce genre de manga où le personnage principal doit pouvoir donner lieu à des fanarts. Mais très vite, se semblant d’intégrité artistique se renie, voyez-vous il se trouvait que Mao Mao ‘s’enlaidissait. Il y a certes un fondement de justification du fait que Mao Mao travaillait dans le quartier rouge et voulait éviter d’attirer l’attention sur elle. Il n’empêche que cela ne justifiait pas une telle beauté et on aura par la suite le droit à de nombreux essayages de robe et de maquillage…


Je n’attendais pas un travail de recherche historique et technique d’un niveau encyclopédique, mais comme même un minium pour rendre le manga consistant. Golden Kamui a prouvé que cela est possible d’allier de l’érudition avec une action divertissante et grand public. Ici tout est complétement superficiel. Le choix de la Chine ne semble avoir été motivé uniquement en raison des beaux vêtements que Mao Mao et les concubines portent. En effet, vous n’apprendrez presque rien sur la société chinoise et le la vie à la cour. Si au moins l’aspect de la pharmacopée des poisons et des remèdes avait était un peu approfondis pour compenser…


Au final le cœur des Carnets de l’Apothicaire sont les enquêtes, et Mao Mao passera le plus clair de son temps à jouer les détectives en utilisant très rarement son savoir d’apothicaire. Cela n’aurait pas été un problème si les affaires à résoudre avaient été passionnantes, approfondies et liées à de complexes jeux de pouvoir. Mais les enquêtes qui nous sont présentées sont absolument inintéressantes sur tous les points. Les problématiques sont souvent établies avec un cruel manque d’enjeux. Leurs durées de résolution sont incroyablement courtes. Eviter de faire trainer en longueur un arc narratif sur des dizaines de chapitre est certes une qualité, mais ici les affaires sont tout simplement expédiées. Mao Mao n’est jamais confronté à la moindre difficulté et elle n’en tout simplement pas le temps. Les résolutions d’enquêtes se succèdent tel un long fleuve tranquille. A un moment l’histoire a eu un sursaut qui a ravivé quelques espoirs. Les nombreuses affaires insignifiantes résolues jusqu’à-là étaient en fait toutes liées à travers une tentaculaire et complexe machination. Il y avait là une parfaite justification à l’apparente superficialité des insignifiants mystères résolus. Mais au lieu de se saisir à pleine main de ce fil rouge salutaire, la révélation tourne au pétard mouillé. Une fois l’assassinat évité, l’enquête se clôt de manière active sans chercher à trouver l’éminence grise du complot. Ce sursaut était au final le dernier spams d’agonie de l’intrigue avant de retomber dans un état végétatif, l’encéphalogramme désormais plat.


Quant au personnage de Jinshi que j’ai évité de mentionner jusqu’à présent, il est tout simplement horripilant. Tout dans ce personnage est excessif ou cliché. On retrouve alors le bel éphèbe efféminé sensé faire tomber les damoiselles en pamoison et donner lieu à des fantasmes yaoi. Ce personnage jusqu’à présent insensible aux femmes se trouvera alors prise d’affection pour rustique Mao Mao qui évite les hommes. Il est beau, parfait, n’ose avouer ses sentiments pour l’héroïne et cache un terrible secret sur son passé. Qui donc peu avoir le moindre doute sur le secret qui le lie à l’empereur. Il y a eu quelques personnages écrit avec un peu d’effort comme Lacan, mais Jinshi est vraiment un personnage de pur fan service.


Ce manga est avant tout une adaptation d’un Light Novel, et les défauts les plus rédhibitoires de ce type de média s’y sont retrouvé transposé. L’intrigue souffre d’un format extrêmement épisodique tout en évitant le plus possible de faire progresser l’histoire le long d’un fil rouge. Les nombreuses thématiques choisies ne sont au final que purement cométiques et superficielles. Les Carnets de l’Apothicaire tient plus de d’un Sherlock Holmes au rabais combiné à de la tenenovela dans une cour idéalisé et rutilante.


Je me permettrai une comparaison avec le manga Arte. Bien que les œuvres sont différentes dans leur ton et intrigue, on retrouve comme même des idées de départ assez similaire. Dans les deux mangas ont suit une héroïne vivant à une ancienne époque dans un pays étranger (Chine et Italie de la Renaissance), l’héroïne en question excelle dans une discipline qui est mal vue pour une femme de pratiquer (médecine et peinture). Arte a cependant une structure plutôt orienté shonen : progression du protagoniste, ici pour devenir un artiste accompli, et non pas orienté sur des mystères. Arte malgré ses nombreux défauts liés à l’écriture de son héroïne, la structure de shonen et un féminisme manquant de subtilité, on a pourtant un manga qui utilise bien plus intelligemment ses atouts. Ici le cadre et le contexte historique ne sont pas purement esthétique mais son à la fois documentés et liés à l’intrigue. Les compétences de l’héroïne sont cette fois un peu plus mise en valeur et détaillées, au contraire de MaoMao dont les talents ne sont pas approfondis et dont l’absence n’aurait pas transformé l’histoire en profondeur (elle aurait tout aussi bien pu être une simple servante). Enfin les intrigues prennent un minimum de temps pour introduire les enjeux et y apporter une conclusion, au lieu d’enchainer de courtes enquêtes sans profondeur. Arte bien qu’étant simplement correct, sa qualité est largement supérieure sur de nombreux points à celle des Carnets de L’Apothicaire, cependant le manga n’aura cependant pas eu droit à un anime de qualité pour assurer sa promotion.


Les Carnets de l’Apothicaire reste comme même un divertissement qui se lit sans être désagréable et sans souffler du nez. Le manga n’est pas exécrable, mais il n’excelle en rien du tout. Mais la note est comme même sévère pour sanctionner deux points. Premièrement, quand on annonce des promesses alléchantes et des ambitions, il faut s’y tenir ou au moins essayer. Quand les promesses sont trahies sans que cela soit pour servir une proposition artistique, cela est un manque d’honnêteté et d’intégrité. Le second point est que l’œuvre est complétement surestimée, sûrement par un lectorat qui trop habitué à consommer des œuvres médiocres aura été impressionner par une œuvre qui sort légèrement des tropes actuels malgré une écriture fade. L’adaptation animée a au moins une meilleure qualité visuelle que le manga, mais les louanges et le succès commercial. Si je dois comme même concéder un point positif aux Cahiers de l’Apothicaire, c’est de montrer que des mangas n’étant pas des nekkestu/isekai peuvent avoir un grand succès. Stimuler un peu la curiosité est déjà un bon début. Une note plus « objective » aurait été un 5 neutre reflétant son insipidité sur le long terme, mais les deux points évoqués font tomber ma note à 4.


Elzear
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