Comme nombre d'amoureux du football, Didier a été traumatisé par la demi-finale de la Coupe du Monde 1982 opposant à Séville l'équipe de France à l'équipe d'Allemagne. C'est peu de dire qu'il vit passionnément le football, que ce soit sur le terrain comme modeste footballeur aux côtés de son ami Fred ou sur le bord de touche comme spectateur des matchs de son fils Antoine. Dans les deux cas, même si c'est en des termes différents, on se montre gêné par son comportement excessif.
Tout à sa passion, le voilà une fois de plus devant les images de ce que certains n'ont pas craint de nommer la "tragédie de Séville" et il pense avoir trouvé le "détail qui tue" dans l'entrée du défenseur Battiston au poste d'attaquant. Avec son ami Fred, journaliste qui a ses entrées dans le monde du ballon rond, il se met en tête d'enquêter sur le pourquoi de ce qui apparaît à ses yeux comme une aberration.
C'est ainsi que Didier, après avoir échoué à s'entretenir avec l'arbitre va rencontrer d'autres protagonistes de ce 8 juillet 1982. La victime, Battiston, et son bourreau, le gardien allemand Schmacher, le capitaine emblématique Michel Platini dont la posture rappelle un Marlon Brando âgé-"Putain, non, c'est Apocalypse Now !" et pour finir le sélectionneur Michel Hidalgo, désormais un vieil homme malade qui va lui poser la seule question qui vaille : pourquoi donc tient-il tant à refaire le match ?
Pour qui aime autant le football que Tronchet et appartient à la même génération que lui, cette bande dessinée est un régal ; pour les autres, à l'image de l'épouse de notre passionné Didier, l'ignorance de certaines choses du football peut constituer un obstacle de nature à modérer cet enthousiasme. Comment comprendre en effet, sans connaissance poussée du jeu, que Didier, lors du 2° sacre de la France en 2018, ait une préférence pour le football pratiqué par la Croatie qui lui rappelle celui de la France de 1982 ?
Tronchet m' avait déjà enthousiasmé avec la parution de son récit autobiographique "Football mon amour" en 2010, il confirme dans cet ouvrage sa connaissance subtile du jeu qu'il agrémente d'un humour dans lequel l'autodérision tien une grande place. Quant au dessin de Jérôme Jouvray, il est en parfaite adéquation avec le propos, le graphisme utilisé pour Jean-Claude Tergal ou Raymond Calbuth n'étant guère envisageable ici !