La reprise récente du personnage par Serge Carrère m'ayant vraiment déçue, j'en ai profité pour me replonger dans mes "vieux" Talon, ceux du vrai, le seul, l'unique Talon qui m'a tout de suite fait aimer cette BD dès que je l'ai découverte dans le journal Pilote vers 1968 alors que j'étais encore gamin ; Achille Talon avait toutefois commencé ses "exploits" bien avant, le 14 novembre 1963 exactement, dans le n° 212 du journal, j'ai dû vite rattraper mon retard, mais avec une délectation indéfectible.
Et pourtant, au début, je ne comprenais pas toujours tout à ses logorrhées légendaires, j'ai pu les apprécier un peu plus tard en grandissant, preuve que cette série est souvent considérée à tort pour la jeunesse, alors qu'elle s'adresse à des adolescents et des adultes ayant quand même une certaine culture, car les dialogues sont souvent recherchés et subtils, en faisant preuve d'une érudition inattendue pour une BD humoristique. Greg était un génie, mais ça vous le saviez non ?
Encore que dans ce premier album qui marque ses vrais débuts, Achille n'est pas au top de sa forme littérale ; comme dans toute première série, Greg cherche la bonne formule et teste diverses manoeuvres pour y arriver. Il a quand même un avantage, c'est que c'est un auteur spécialisé dans l'humour, ses anciennes séries (parfois éphémères) dans le journal Tintin, comme Babiole et Zou, la souris Bolivar, ou encore Rock Derby, et sa reprise de Zig et Puce lui ont permis d'avoir toujours des idées mirifiques. Ce n'est donc pas étonnant que Achille Talon soit vite devenu l'un des personnages les plus populaires de la BD franco-belge, avec Tintin, Astérix et Lucky Luke, et aussi l'un des plus traduits et les plus diffusés, notamment en Allemagne qui reste le pays le plus réceptif après la France et la Belgique.
Ici, Talon n'est donc pas aussi volubile, mais les personnages principaux sont là (Papa-Talon, la maman gâteau, et surtout Hilarion Lefuneste, prototype du voisin crispant qui comme le Ducrin de Modeste et Pompon, génère de nombreux gags), le petit univers talonien est en place, le caractère du personnage de Talon, prototype du petit bourgeois suffisant et imbu de lui-même, est déjà défini en substance, l'esprit d'ensemble est posé.
Graphiquement, c'est pareil, Greg n'a pas encore affiné son dessin qui n'est pas encore habitué à une série durable, le personnage n'est pas aussi bedonnant, la silhouette est un peu tassée, mais il va vite s'améliorer. Encore une fois, cette BD est un essai, Greg se livre à une tentative d'humour nonsensique à la demande de Goscinny, directeur de Pilote qui se voulait un émule du MAD américain, et il n'est peut-être pas sûr que ça va marcher. Mais je crois qu'il avait un bon instinct, car il impose la carte de visite du héros et développe déjà des gags ingénieux dont certains vont conditionner les aventures futures de Talon. Premier album, premiers gags... bref une bonne entrée en matière que tout fan doit posséder.

Ugly
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le 28 oct. 2020

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