Ce n’est plus une histoire mais un Monument que nous propose Mathieu dans Les Sous-sols du Révolu tant les personnages, les concepts et la narration amènent une expérience de pensée.
Le musée se fait entité protéiforme à part entière : cadre de tout le récit, lieu de travail, lieu de vie, lieu d’explorations voire d’aventures, c’est plus qu’un lieu, une institution dont chaque personnage est autant un ouvrier qui y travaille qu’une partie autochtone de cet établissement. Le lecteur suit un Volumeur nouvel Ulysse en Odyssée dans une institution où chaque corps de métier est une rencontre exotique ; l’absurde se poursuit tout au long du livre tant les éléments rationnels s’enchaînent, services, administration, emplois, sans pourtant évoquer la question du directeur ou de tout payement dans un musée Terra Incognita.
Le tour de force de cet ouvrage est de traiter d’un Musée sans que l’on demande un instant de voir ses œuvres : les œuvres ne sont pas là pour être vues mais pour les concepts qu’elles véhiculent dans l’histoire (ainsi l’œil du cyclope, symbole du regard des origines ou naissance du regard intelligent/sensible). Chaque partie de l’institution est une façon d’aborder les corps de métiers de la conservation du patrimoine et de la restauration en se posant des questions absurdes, entraînant des problèmes, des questionnements, des situations comiques, des aberrations, amenant un œil neuf sur les techniques abordées.
Une expérience de pensée filée aussi inventive qu’intelligente, où la fin nous dévoile la symbolique du livre-ou est-ce seulement à ce moment là que j’ai réalisé ?-, que l’art est protéiforme et inquantifiable, et que la tentative de le cerner par des artistes ou historiens de l’art est impossible, l’art est mouvant, indéfinissable, immense et varié, insaisissable par l’humain.