Pris sur le vif, intéressant sans être révolutionnaire.

En septembre 2004, Ferrandez part assister aux Rencontres européennes du Livre à Sarajevo. Il en profite pour visiter différents endroits en Bosnie-Herzégovine, à la fois en fédération croato-bosniaque et en republika sepska. L'occasion de jauger l'état du pays après la guerre.

Le livre est fort beau, et a le mérite de s'intéresser à un des moins connus des pays des Balkans, celui à l'histoire la plus complexe, la plus enchevêtrée, puisque c'est là que se faisait le point de contact, et souvent de friction entre l'empire ottoman, l'empire austro-hongrois, les Serbes orthodoxes et le catholicisme venu d'Italie.

Les pages ont une couleur crème agréable, le livre est en format italien, avec une couverture qui se déplie vers le haut, offrant à voir plusieurs cartes du pays. Il y a du texte (sans doute la raison pour laquelle ce livre, à ma grande surprise, n'est pas classé "BD"), mais Ferrandez insère des croquis, et ces dessins à applat de gouache qui font sa marque de fabrique.
Le livre suit le séjour chronologiquement, même si l'auteur s'efface derrière son sujet, sauf au début et à la fin.
On commence par le récit de l'arrivée, une brève chronologie, une journée où Ferrandez emmène des enfants croates et bosniaques mélangés (ce qui n'est pas le cas à l'école) faire un atelier de dessin à Stolac.
On suit ensuite des séries de double-page consacrées à différents lieux où Ferrandez est passé :
- Pocitelj avec son fort médiéval et sa mosquée.
- Blagaj, lieu de villégiature à la résurgence d'une source au pied d'une falaise de calcaire.
- Mostar et son pont.
- Sarajevo, vue à travers divers lieux : Bascarsija (le marché), Sebilj (ses cafés en terrasse), la bibliothèque (ancienne mairie reconvertie, filmée dans Notre musique de Godard), le pont Princip. Il y a des mises au point sur la religion, sur le journal Oslobodeje, sur le tunnel entre la ville et l'aéroport, sur le pont des chèvres, et sur les fameux tramways. Brève description du centre Malraux tenu par Francis Bueb, et sur le fameux salon du Livre.
- Incursion au milieu des stèles bogomiles.
- Neum, virée décevante sur la côte (je me rends compte que j'y suis passé aussi, et que j'avais au contraire était fasciné).
- La republika Srpska, au paysage plus alpin : parc national de Sutjeska, Pale (où était le QJ de Karadzik), Lukomir, village hors du temps, avec ses paysans portant un béret francuzica.
- Départ, anecdote de la perte du passeport, miraculeusement retrouvé.

C'est intéressant pour quelqu'un qui ne connaît pas du tout, mais une personne déjà familiarisée avec les Balkans et le conflit bosniaque n'en sortira peut-être pas bouleversée. Cela donne tout de même envie de creuser la culture locale, de se renseigner davantage, etc...

Les tramways de Sarajevo n'est sans doute pas le livre le plus bouleversant de Ferrandez. Mais l'association du texte et des beaux dessins pris sur le vif a cependant du charme.