Divina Déceptio...
Les Vacances de Jésus et Bouddha... Voilà un titre original. Pour résumer rapidement l'histoire de ce manga, je dirais qu'on suit Jésus et Bouddha qui, après avoir oeuvré pendant deux millénaires ...
Par
le 14 mars 2011
8 j'aime
Dans la mesure où bouddhisme et christianisme sont de mise, j’en déduis qu’il n’est alors point question d’humour juif. Et pourtant, ça s’y rapporte. Ça s’y rapporte en ce sens où ce n’est pas drôle tout en étant sans cesse à côté de la plaque en affectant de se trouver tout au centre. Le manga ? Il nous fait vingt tomes, et le long de cette navrante pérégrination, pas un rire ne nous sera soustrait.
« Eh quoi ! Un manga sur Jésus et Bouddha comme colocataires au vingt-et-unième siècle n’est pas tenu d’être nécessairement porté sur le gag »
Il l’est, s’il se présente comme un manga humoristique. Ce qui, hélas, se trouve être le cas. D’ailleurs, n’aurait-il pas la fibre comique à mettre en avant que vous n’y trouverez aucune espèce d’autre contenu. Le manga, en l’état, est une succession navrante de tentatives de blagues qui… n’ont franchement rien de drôles ou de pertinentes. N’étant pas un cul béni, ayant même la profanation dans le sang, ce n’est pas le commentaire d’un religieux aigri que vous lisez, simplement celui d’un lecteur dépité par ce qui lui est passé sous les yeux.
Quitte à se rire de deux courants religieux majeurs sévissant à ce jour, pourquoi ne pas y aller plus franco ? Hikaru Nakamura effleure à peine le socle religieux sur lequel il est pourtant censé reposer son œuvre tout entière. Les plaisanteries inhérentes au corpus eschatologique sont superficielles, gentillettes et cherchent à ne pas choquer. Une approche aussi consensuelle le prive et donc, nous prive d’un contenu à même de nous arracher un rire coupable.
Si ce n’est se rire de leur apparence durant un temps – un temps interminable – on ne trouve trop rien à dire à leur sujet. Mais croyez-moi que l’auteur ne se privera pas de rallonger la sauce jusqu’à ce qu’elle n’ait plus que le goût de l’eau. Une eau croupie d’où il a apparemment puisé jusqu’à la dernière bribe de sa créativité.
Je suis sincèrement estomaqué. Pour avoir lu mal de mangas humoristiques, de Gintama à l’infantile Dr. Slump sans manquer de passer par chez Bobobo-bo-bobo, Angel Densetsu ou encore l’excellent Pyuu to Fuku Jaguar, le rire, je prends ça au sérieux. Tous ont trouvé le moyen de me l’arracher à un instant donné ce petit rire, ou ne serait-ce au moins qu’un tremblement au coin des lèvres. Mais jamais ici – et je mets un emphase tout particulière sur le « jamais » qui vous parvient alors – jamais un manga se piquant d’humour ne sera pas parvenu à susciter le moindre amusement.
Vingt volumes et pas un rire à l’horizon. Une véritable traversée du désert. Vous avez vu, moi aussi je fais des références à un texte religieux, c’est drôle, hein ? Pas franchement en réalité, même pas du tout. Et ce sera de ce genre de… gags (?) dont sera fait Saint Young Men. De l’humour juif, vous dis-je. Pas un rire n’est à espérer.
Alors, les références sont nombreuses, mais nous échappent dès lors où l’on se trouve assez éloigné des enseignements du Buddha. Même à moi qui ai pourtant lu La Vie de Buddha – dont l’auteur fera une prévisible mention dès le deuxième chapitre – la plupart des références m’échappent. Du reste, les connaîtrais-je que je ne rirais guère davantage. Mais quitte à rester les lèvres scellées et le regard sévère, j’aurais au moins espérer en apprendre un peu plus sur un courant religieux majeur. Que je ne sois pas venu à l’œuvre pour rien.
Les personnages secondaires, tirés des textes et autres folklores religieux se rapportant aux protagonistes, sont unidimensionnels et donc, aussi plats que le restant de ce qui constitue le présent manga. Des dessins, il en émane les exhalaisons mièvres et gentillettes dont est fait un manga qui cherche clairement à ménager les deux religions dont l’auteur affecte prétendument d’en rire. Les esquisses ont un peu de caractère et se rapportent à un style particulier qui, cependant, ne nous touche en aucune façon. Le dessin, assez féminin dans les traits, accompagne bien mal l’humour. Ou peut-être, justement, ne l’accompagne-t-il que trop bien, puisqu’il est alors aussi insipide que les frasques supposées drolatiques qui nous parviennent en cascade.
Parce que ça n’arrête pas. L’auteur multiplie désespérément des séries de gags dans chaque chapitre, au point de nous saturer et nous noyer sous des trombes d’ennui pur. On est prisonnier de ce manga, cloisonné perpétuellement en compagnie de ces deux personnages sans caractère, qui n’ont pour eux que les récits qui les concernent.
Quitte à blasphémer, autant le faire sans réserve, gratter où cela peut faire mal. Qui se contente d’un humour tenant aux choses superficielles de la vie a bien trop peu d’esprit s’il s’en contente. Mais ici, on ne dérange pas les vieilles dames en abordant des moqueries retenues se rapportant exclusivement à l’écume des choses. Et des choses mal narrées qui plus est. Ça a beau être un récit épisodique, de la Tranche de Vie, c’est une tranche qui nous est alors servie sans beurre et même sans pain (ce serait l’occasion de faire une blague sur la multiplication des pains, mais je m’en voudrais de faire concurrence à monsieur Nakamura). L’orchestration des planches suggère la claustrophobie, coincés qu’on est sans cesse entre ces deux personnages dont on voudrait être privés de la présence le temps de souffler.
Que ce soit sur le plan conceptuel ou humoristique, l’exécution est parfaitement loupée. Pas un peu, pas énormément : PAR-FAI-TE-MENT. Pour s’employer si bien à ne pas nous faire rire, l’auteur a du, je pense, faire preuve d’énormément d’efforts. Pas un sourire ne nous vient, même par accident, en vingt tomes. Je suis encore abasourdi de devoir dresser ce constat, mais c’est là la stricte vérité. Une vérité révélée oserais-je même vous dire.
La lecture d’un premier volume – j’aurais dû m’arrêter là – devrait en principe convaincre chacun qu’il ne fera pas bombance d’humour. La suite est du même tonneau, l’auteur s’en tenant invariablement à sa recette, nous cuisinant sans cesse et sans répit les mêmes ingrédients rancis qui, quand on les déguste, n’ont jamais de goût ou de saveur à nous faire parvenir. Le seul attrait de l’œuvre tient à son concept, un qui ne tiendra aucune promesse et dont, de toute manière, on n’attendra rien passé les premières pages.
Créée
le 30 oct. 2024
Critique lue 94 fois
5 j'aime
D'autres avis sur Les Vacances de Jésus & Bouddha
Les Vacances de Jésus et Bouddha... Voilà un titre original. Pour résumer rapidement l'histoire de ce manga, je dirais qu'on suit Jésus et Bouddha qui, après avoir oeuvré pendant deux millénaires ...
Par
le 14 mars 2011
8 j'aime
C'est en flânant dans les rayons mangas de la FNAC que je remarquai le livre de Hikaru Nakamura, discrètement posé parmi d'autres .Tout d'abord le titre surprend il faut l'avouer, mais très vite,...
le 22 août 2011
7 j'aime
1
Dans la mesure où bouddhisme et christianisme sont de mise, j’en déduis qu’il n’est alors point question d’humour juif. Et pourtant, ça s’y rapporte. Ça s’y rapporte en ce sens où ce n’est pas drôle...
le 30 oct. 2024
5 j'aime
Du même critique
Nous étions le treize avril de l'an de grâce deux-mille-six, j'avais treize ans. Je venais de les avoir à dire vrai ; c'était mon anniversaire. Jamais trop aimé les anniversaires, il faut dire que je...
le 20 juil. 2020
62 j'aime
170
Ça nous a sauté à la gueule un jour de printemps 2013. Il y a sept ans de ça déjà (et même plus puisque les années continuent de s'écouler implacablement). Du bruit, ça en a fait. Plein, même. Je...
le 8 avr. 2020
35 j'aime
60
Il s'agit là du premier dix que je suis amené à délivrer pour une des œuvres que je critique. Et je n'ai pas eu à réfléchir longuement avant d'attribuer pareille note ; sans l'ombre d'une hésitation...
le 17 janv. 2020
34 j'aime
14