Lou ! Sonata, tome 1
7.3
Lou ! Sonata, tome 1

BD franco-belge de Julien Neel (2020)

Premier mouvement d'une jeune adulte en errance

"Lou !" fait parti des BD qui ont bercé mon adolescence. C'est une héroïne avec laquelle j'ai grandi.
J'ai toujours été fascinée par le fait que je me retrouvais toujours en elle, à travers ses questionnements.


Je devais donc être au rendez-vous pour ce nouveau tome qui amorce une nouvelle manière de raconter son histoire. On sent que Julien Neel a pris plaisir à pouvoir enfin exprimer toutes ces idées sans la contrainte du format (144 pages au lieu des 48 pages habituelles). Le dessin fluide et coloré rend toujours grâce à la rêverie de Lou et à ses multiples réflexions sur son existence. J'ai beaucoup apprécié le travail de mise en page : surtout les passages où le studio de Lou présenté en 3D s'entremêle aux cases et les plans larges jouant sur les fonds blancs et noirs pour accompagner l'ambiance.
Et encore une fois, mon identification à Lou été très puissante : cette sensation de confort matériel et psychique d'un "chez soi" qu'on ne souhaite pas quitter, la création d'habitudes apaisantes mais incompréhensible pour les gens d'extérieurs, ce besoin de créer quelque chose qui n'entre pas "dans le sujet demandé", l'impression de faire du surplace ou que la vie est parfois déjà écrite... C'en est presque troublant.


Mais Monsieur Neel... comment faites-vous pour sonder aussi bien l'âme de cette jeunesse perdue, maladroite, errante mais créative, avide d'expériences humaines, en quête de sens et de vérité ?


Cela m'a beaucoup touché dans la façon dont Julien Neel arrive à décrire cet état "nouveau" qui est la période du jeune adulte (aux alentours de la vingtaine). Nos premiers pas dans les étude supérieures qui amorcent petit à petit le chemin qu'on souhaite construire pour notre vie future... la peur de se tromper de voie, le courage de revenir en arrière, d'accepter la perte d'un de ses proches ou la distance qui s'installe entre soi et sa famille aussi bien physique que psychique.


La force de cette BD a toujours été d'adopter ce langage proprement cinématographique qui permet au lecteur de comprendre toute l'émotion du personnage rien qu'au dessin et au regard en se passant des dialogues. Les scènes les plus éloquentes dans ce sens sont celles des "pansements" avec Marie-Lou, avec Lou qui surfe sur Instagram ou encore celle de Lou et sa mère se partageant une tasse de thé sur la terrasse.
Même certaines passages ont à peine un encart pour décrire l'évènement. Et ça fait du bien de pouvoir prendre ce temps de savourer, de se questionner avec Lou sur ses tourments.


Tout le paradoxe réside aussi sur la perte de repère aussi bien sur la forme que le fond du scénario.
L'ADN de "Lou!" reste intacte : on retrouve la pointe d'humour "enfantine" empreint de gags visuels, les cases en gros zoom sur les visages, les plans "larges" mettant en valeur l'environnement dans lequel évoluent les personnages avec toute la symbolique associé, la créativité et la sensibilité particulière de Lou, l'influence importante des personnages secondaires dans le déroulement de l'intrigue.


Mais pourtant, on sent que quelque chose a changé. La nostalgie et la mélancolie ont une place prépondérante. Le lecteur est amené à plus d'introspection et de contemplation, l'humour reste quand même très peu présent, les amis de Lou font des apparitions presque anecdotiques si on compare aux précédents tomes (bien que Marie-Lou est mise en valeur de manière très appréciable).


Cette lecture a été un moment cocooning où les compositions musicales proposées au lecteur pour accompagner son voyage ajoute une plus value sympathique et immersif. Disponible sur les plateformes du net, on sent une timide proposition "transmédia" toute en finesse.


Les seules petits reproches que je peux faire, c'est :


=> qu'on n'a plus le droit à ces fameuses doubles-pages à l'intérieur du livre où on avait des extraits du journal intime de Lou. Ce qui peut s'expliquer en parti par la franche coupure entre le monde adolescent et le monde adulte dans lequel elle baigne maintenant.


=> Qu'on n'est pas le droit à plus d'exposition sur les nouveaux personnages secondaires introduits. Mais cela correspond au fait qu'on adopte uniquement le point de vue de Lou dans la continuité du tome 7 et 8. Mais aussi cela est en phase avec le développement psychologique du personnage et à son errance nourri par les rencontres fortuites et éphémères.


Mais aussi... au fait qu'on n'est pas plus de pages !!! On en veut plus ! héhé !


J'ai hâte de découvrir la suite de cette Sonata.


Et j'invite tout lecteur à se procurer rapidement ce nouveau tome.


Evidemment les lecteurs aguerris de la série "Lou!" s'y retrouveront totalement. Pour les nouveaux... cela se discute. Je pense sincèrement qu'ils peuvent s'y aventurer car les pages laissent suffisamment d'indices clairs sur les relations entre les personnages sans forcément avoir suivi les autres tomes.


Les rares clins d'œil aux anciennes histoires ne laissent pas les nouveaux lecteurs de côté mais les invitent à assouvir leur curiosité en se procurant ceux de la première saison !

AudreyAnzu
8
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Créée

le 4 déc. 2020

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20 j'aime

AudreyAnzu

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