Je me souviens... j'ai eu ma première connexion Internet à 15 ans, c'était en l'an 2000, après le fameux bug. Un copain 'calé' en informatique m'avait aidé à installer tout le bazar, m'avait aidé à créer ma première boîte email (que j'utilise toujours malgré le chiffre 669 - je vous rassure je postule avec une autre adresse plus sobre) et m'avait ensuite montré quelques possibilités ludiques, dont les 'chatroom', lieux virtuels où les gens se parlent, se 'rencontrent'. C'était très simple, mais déjà certains créateurs songeaient à une déco aguichante : moi j'ai échoué sur caramail où j'étais un jeune moussaillon susceptible devenir un capitaine je crois (je ne me souviens plus des grades, juste que le premier niveau était atteint après 1h de 'vie' sur le forum). C'est ainsi que j'ai commencé à parler à des inconnus. Draguer des filles. Me faire passer pour quelqu'un d'autre. Me moquer des gens dans un salon chrétien. Découvrir la signification derrière l'appellation "Château d'o". Plus tard, j'en viendrai même à appâter des femmes, jeunes ou vieilles, sur MSN afin de les éblouir de ma splendeur testiculaire, ce qui avait comme conséquence de soit les repousser, soit les inciter à en demander plus. Mais ce souvenir-là, ce sera pour une autre fois. Ici, je vais plutôt aborder mon premier souvenir marquant lié aux joies de l'internet, plus précisément des chatroom ; ce que j'ai appris, c'est que même virtuellement le monde est petit et que l'internet, si on n'y fait pas gaffe, ça peut avoir des répercussions sur la vraie vie.


Un jour, je ne sais plus dans quel salon, j'ai rencontré une jeune femme dont j'ai oublié le nom, appelons là Elodie. Elle habitait pas très loin. Elle avait mon âge. Elle était sympa. On s'entendait bien. On a beaucoup discuté. Soudain, un bug. Redémarrage de l'ordinateur ; connexion à internet ; chargement du forum ; recherche du salon ; recherche de la personne. Problème : elle n'est plus là. Je suis bien malheureux car nous n'avions pas eu le temps de nous échanger de nos MSN, trop occupés que nous étions à batifoler (en tous cas, moi, je batifolais) ou même à s'ajouter sur caramail, surtout que je n'avais plus son pseudo entier. Plus qu'un seul moyen : un appel à l'aide ! Je fonce sur le public et là je 'crie' que je recherche Elodie qui habite telle ville et qui a 15 ans. Une réponse ne se fait pas tarder, de la part d'une jeune fille de 14 ans.
- Qu'est-ce que tu lui veux ?
- Je lui ai parlé tantôt on s'est super bien entendus mais mon ordi a bugé, et je l'ai perdue de vue.
Un long silence puis :
- Qui tu es ?
Je suis un peu embêté par cette question : en quoi ça la regarde ?
- Tu a connais ? que je lui demande
- Qui t'es ?
- Je t'ai dit, je lui ai parlé tantôt, je m'appelle Maxime... J'ai les cheveux décolorés en ce moment... j'aime bien le Punkrock...
- C'est ma sœur !
Le coup de pot ! Si ça c'était pas une veine de cocu...
- Génial, tu me la passes ?
- Non.
- Pourquoi ? Sois pas chiante !
- T'es de où ?
- Ben je suis de XXX.
- Elle pleure.
- Quoi ?
- Son mec n'est pas content, il a lu la conversation, il l'a giflée. Il dit qu'il va la quitter et te défoncer.
- Quoi ??? mais c'est pas possible, elle m'a dit qu'elle était célibataire !
- Son mec est furieux. Il demande où tu vas à l'école ?
- La ville YYY... Mais c'est pas possible, La Elodie à qui j'ai parlé est célibataire... Elle est bien de XXX ? Elle a bien 15 ans ? Elle a bien les cheveux blonds ?
- Elle a 18 ans. Son mec va te défoncer.
- Quoi ??? Tu te fiche de moi ? J'ai dit qu'elle avait 15 ans.
- Ma sœur a 18 ans. Son mec me demande si tu vas bien à l'Athénée Royal ?
Je suis un peu surpris par cette précision...
- Dis-lui qu'il y a méprise !! Je recherche une Elodie qui a 15 ans, pas 18 ! Je la connais pas sa copine !
- Non.
- Comment ça non, ils sont en train de se disputer pour rien.
- Il a dit qu'il allait te défoncer.
- Putain, t'es trop conne ! Je t'ai dit que c'était pas la bonne !
- Ils sont partis de toutes façons. Allez, moi j'y vais.
Et elle se déconnecte. Je dois dire que j'étais un peu confus : était-ce un canular ? Cette précision pas anodine du tout me faisait penser que non, mais la situation était trop surréaliste pour être plausible.


Le lendemain, la journée se passa sans aucun soucis. J'avoue que j'étais un peu nerveux à l'idée de me faire attraper et m'imaginais toute sorte de gars en guise d'adversaire. Un gars de 18 ans en plus... donc quelqu'un de dernière année en toute logique. Lorsque la dernière sonnerie retentit, j'avoue que j'avais déjà oublié cette affaire, confiant qu'il était trop tard pour recevoir une quelconque correction. Grand mal m'a pris ! J'arrive à la sortie, accompagné d'un copain où tous les élèves s’agglutinent quand je vois arriver, en contre-sens, un mec assez baraqué. Ce mec, c'est Fabiano, un type que je côtoie dans ma classe d'anglais et en sport ; il fait partie des doubleurs, des racailles. Je sais qu'il pratique la boxe à ses heures perdues, on dit qu'il est hyper balaise. Il me fait face et me demande directement :
- C'est toi qui a dragué ma copine ?
Désarçonné par sa question directe, je rétorque mon excuse péniblement, je crois qu'il n'entends même pas ce que j'essaie de dire. Avant même que je n'ai terminé ma phrase, il a dit qu'il savait que c'était moi, qu'il m'avait reconnu. Il se retourne vers ses sbires et il se marre genre 'j'vous l'avais dit les gars'. Je ne sais plus trop ce qu'il me dit, j'étais trop nerveux, je me souviens qu'il me met en garde :
- Si tu approches encore ma copine, je te défonce, t'as compris ?
- Oui, répondis-je, soumis.
- Y paraît que ton père est flic ?
Là il jette un regard à un de ses sbires qui, croyez-le ou non, était un ancien camarade du primaire que j'vais perdu de vue jusqu'à cette année-là.
- J'm'en fous moi que ton père est flic, si tu me fais chier j'te défonce, c'est tout.
Ses copains s'esclaffent, hilares. Lui il poursuit :
- Là, j'te fais rien parce que bon, t'es comme mon doigt (il tend le petit doigt), si je te frappe, tu vas voler en mille morceaux (à nouveau, ses copains se marrent).
- O... ok...
- Donc fais gaffe à toi, j'te surveille !
Là-dessus, il fait demi-tour, quitte le passage que nous obstruions un peu. Mon pote, qui avait suivi la scène sans broncher, m'a demandé :
- Qu'est-ce que t'as fait ?
Je lui ai tout expliqué. Je me suis demandé, lâchement, pourquoi il n'était pas intervenu. Il était plutôt bien bâti, fort, sportif, ... puis je me suis dit que s'il avait bougé le petit doigt, Fabiano et ses sbires l'auraient tabassé et certainement moi aussi (encore que j'en aurais ptet profité pour fuir). Le drame aurait pu s'arrêter là, mais le fait est que j'avais perdu la face... et dès lors, les trois années qui suivirent furent parsemées de petits tacles : en anglais, sa bande me jetait des boulettes de papier dans le dos. Je me souviens d'un boulette lancée particulièrement fort, qui a heurté ma tête avec un gros 'Chtok' ; le bruit fut si fort, que la prof d'anglais, occupée à écrire le journal de classe au tableau) se retourna et me vit, tout rouge. Je me souviens qu'elle a juste dit : je suppose qu'il est inutile de demander ce qu'il se passe, personne ne répondra... et elle a repris ce qu'elle faisait. En gym aussi, ils m'embêtaient. Un jour,k j'étais gardien de but, ils ont pris un malin plaisir à tirer de toutes leurs forces... inutile de vous dire que mon équipe a perdu ce jour-là... la plupart du temps je me réfugiais dans la salle de Ping Pong, mais l'un d'eux y allait aussi et s'amusait à me balancer des trucs pendant que je jouais. Un jour, en retournant dans le vestiaire, je découvris mon sac cadenassé à un grillage. Quand les autres rentrèrent pour se changer et virent le sac, ils en rirent. Ceux de ma classe étaient un peu plus compatissant, mais riaient un peu aussi (je ne peux pas les blâmer, la situation était comique). Et évidemment, personne n'avait la clef de ce cadenas. Le prof, ça l'emmerdait un peu parce qu'il était pressé de rentrer chez lui, c'était la dernière heure de cours. Il a dû faire appeler l'ouvrier de l'école pour qu'il scie un barreau du grillage. En attendant son arrivée, un des molosses a voulu faire le type sympa qui trouve que ça va trop loin : il s'est approché et il a dit "hooo nooon, ils sont vraiment dégueux... moi ça me dégoûte, regarde ce qu'ils ont fait, je te préviens c'est pas moi", et il retire une boîte de jus de fruit vide de mon sac. Il jouait très mal la comédie, je ne sais donc pas trop ce qu'il espérait faire de la sorte... J'ai bien sûr récupéré mon sac et toute l'année j'ai 'subi' ce genre de petites farces. On m'a appelé "Meh" aussi. Je ne suis pas sûr de la manière de l'écrire, un jour je leur ai demandé ce que ça voulait dire, ils ont répondu 'moustique'. Je me souviens d'une fois où je croisais une fille dont j'étais amoureux. Nos regards se sont croisés, j'étais heureux qu'elle me remarque, puis je me suis retourné et j'ai remarqué que deux de ces racailles étaient derrière moi en train de se moquer de moi. Ma dulcinée avait certainement souri à cause de ça.


Assez bizarrement, je n'ai pas souffert de tout ça. C'était chiant d'aller en anglais et en sport, mais je n'en faisais pas un malaise. Et puis, ils se sont un peu lassés sur la fin. Je me souviens que la dernière fois qu'ils se sont foutus de moi, c'était parce que j'avais mis du vernis noir sur une main : Fabiano ne comprenait pas pourquoi et ça le faisait marrer. On était en dernière année.


Bon... et la critique ? Ben l'album est plutôt chouette. Geluck ne change plus sa formule, il reste sur ses acquis. Heureusement il a toujours autant de bonnes idées qui font rire. Sa mise en page est toujours aussi bien aérée, il n'en met jamais trop sur une page et varie les formes (strip ou en une image).


Bref, ce tome 6 est agréable à lire.

Fatpooper
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le 1 mai 2016

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Fatpooper

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