Ce livre est le résultat d’un projet de Thierry Joor directeur éditorial chez Delcourt. L’idée est de rendre compte des grandes catastrophes qui ont jalonné l’histoire de l’humanité. Pour Corbeyran, l’évidence se situe à Fréjus ou pas très loin, là ou vie familiale et amitiés l’emmènent régulièrement. 2009, cinquantenaire de la tragédie de Malpasset, on en parle beaucoup et Corbeyran découvre cette tragédie. L’idée lui vient alors de construire un récit. Mais son point de vue l’éloignera du sensationnalisme et de la relation chronologique classique, c’est en faisant un travail d’enquête auprès de rescapés, en recueillant des témoignages que l’idée lui vient de se concentrer sur les paroles et les émotions, sur la relations de vie brisées par une tragédie et leurs effets encore visible et touchant cinquante années plus tard.


Angle d’attaque original, assez loin du pathos, difficile car sans reconstitutions d’« images » édifiantes (la tragédie s’est passée une nuit de décembre) et pourtant réussite scénaristique de Corbeyran, et défi pour le dessinateur de rendre compte de la douleur des gens et des interviews.


Seuls trois passages (une dizaine de pages) nous renvoient au moment des faits, le reste nous montre les personnes interviewées. Horne a su trouver des images simples illustrant les propos des rescapés en montrant des objets (un escalier, quand les gens se réfugient dans les étages, une radio, des fils électriques – alors que le courant a sauté – des bottes sales, des briques, un canot de sauvetage, etc…) qui nous permettent d’imaginer, de reconstruire à partir de ces quelques indices ce qui a pu se produire. Des mots, quelques images, le son (trouvaille d’une case rayée de grosses lignes blanches reproduisant un K R O entremêlés rendant le fracas de l’eau déchainée) et notre imaginaire reconstruisent l’horreur de cette nuit tragique.


Paradoxe pour un médium de l’image de finalement ne rien montrer d’explicite, mais de suggérer et de laisser l’imaginaire du lecteur faire son travail.


Une bande dessinée réussie qui reste au plus près des victimes, n’éludant pas les polémiques (beaucoup d’argent fut récolté et distribué, mais aucun suivi psychologique) sans prendre parti, montrant simplement les ravages de la catastrophe, entre sobriété, humilité et respect.

Jean-François2
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le 18 mai 2015

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Jean-François2

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