« Quand Picasso avait 20 ans ». L’autocollant apposé sur l’album est plutôt réducteur. Car la série « Pablo » de Julie Birmant et Clément Oubrerie, deux auteurs pleins de fantaisie et de talent, va bien au-delà d’une simple biographie de la jeunesse du peintre espagnol. Grâce à un savant mélange d’éléments réels et fictifs, Birmant et Oubrerie parviennent, sans avoir l’air d’y toucher ni se prendre la tête, à rendre l’histoire de l’art aussi passionnante que légère. Ce troisième tome ne fait pas exception à la règle. Bon c’est vrai, la couverture de cet album-ci est beaucoup moins belle que celle du tome précédent, mais en même temps elle est révélatrice de l’évolution déterminante vécue par le peintre au cours de ce nouvel épisode. Petit à petit, on assiste à la transformation du jeune Pablo en un grand artiste nommé Picasso. Et c’est ça qui est fascinant. Comme dans les deux albums précédents, Fernande, la compagne de Pablo, joue un rôle central. Alors que Pablo a temporairement troqué Paris pour Barcelone afin de présenter la jeune femme à sa famille, il est rapidement malade de jalousie de voir tous ses amis Catalans s’intéresser d’aussi près à sa belle Parisienne. Du coup, il décide de s’isoler avec elle à Gosol, un petit village particulièrement reculé, accessible uniquement à dos d’âne, où le temps semble s’être arrêté et où les habitants sont plutôt rustres, comme le montre le dessin sur la couverture de l’album. Revenu à cette vie beaucoup plus primitive qui lui plaît beaucoup, Picasso trouve à Gosol une inspiration presque mystique qui l’amène à abandonner la peinture réaliste pour une peinture elle aussi plus primitive. Ce qui n’est pas forcément pour plaire à Fernande. « J’ai un gros cou et les épaules qui tombent », lui dit-elle, en observant le portrait qu’il vient de faire d’elle. Mais peu importe ce que Fernande pense: Pablo se lance corps et âme dans ce nouveau style. Lorsqu’il revient à Paris, ses oeuvres séduisent d’ailleurs son amie collectionneuse d’art Gertrude Stein. C’est elle qui lui présente Henri Matisse, le « petit nouveau » dans ce tome 3. « Il est temps que je te présente C.M. », lui dit-elle. « C.M.? », répond Picasso. « Je ne vais tout de même pas appeler Matisse « cher maître » comme tout le monde », précise l’Américaine. Le ton est donné. Comme cela avait été le cas pour Max Jacob ou Apollinaire précédemment, le personnage de Matisse s’intègre parfaitement dans l’histoire imaginée par Julie Birmant. On sent d’ailleurs que c’est lui qui va faire avancer Pablo encore un pas plus loin vers sa transformation en Picasso. Car en voyant les oeuvres de Matisse, le jeune Espagnol est non seulement fasciné mais également très… jaloux. On ne se refait pas!
matvano
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le 4 mai 2013

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