Je ne m'attarderai pas sur l'horreur des camps et la Shoah en général, les autres membres l'ont très bien souligné. J'ai trouvé cette BD brillante dans sa conception avec les retours dans le présent qui permettent de donner un peu de légèreté à un récit très dur : on y suit les problèmes de couple du père (l'enquêté) mais aussi ses problèmes quotidiens. Cependant, derrière cette apparente légèreté, se cache des problématiques beaucoup plus lourdes. Les camps ont profondément bouleversé les acteurs directs mais aussi les acteurs indirects (les descendants). Dans un premier temps, les acteurs directs sont profondément marqués par l'Holocauste. En effet, le père a développé une forte avarice (que l'auteur a honte de retranscrire, faisant écho aux clichés sur les juifs) et il est obnubilé par le suicide de sa femme (post Shoah). Il essaye d'ordonner sa vie le plus possible pour atténuer le désordre dans sa tête. Dans un second temps, les descendants sont eux aussi bouleversés. L'auteur souffre profondément de la comparaison à son frère mort, de son enfance jusqu'au dernier souffle de son père (dans la dernière case, le père se trompe de prénom). Il a été interné en HP et continue à être suivi par un psy, paraissant presque plus atteint que son père ou bien plus disposé à accepter de l'aide extérieure. C'est ce que j'ai beaucoup apprécié dans cet ouvrage, il mêle histoire, sociologie, psychologie et anthropologie. Il aborde la question du stress post-traumatique, la culpabilité des vivants, la dépression, le suicide mais aussi le racisme avec la question soulevé par le racisme du père envers les noirs. Comment quelqu'un ayant souffert d'un racisme ayant tué des millions de ses semblables, peut-il être lui même raciste?
Un véritable chef d'œuvre pour moi.