Survivre c’est souffrir
La bande dessinée américaine “Maus“ publiée entre 1980 et 1991 est fondée sur l’histoire du père de l’auteur, Art Spiegelman. L’histoire débute dans le petit appartement de Vladek Spiegelman et de sa femme Mala par la visite d’Artie Spielgeman. Ce dernier rend visite à son père après des années, afin de faire un livre sur lui. L’auteur n’est pas très proche de son papa mais l’histoire de sa défunte mère, Anja, et de son parent malade ne peut que rapprocher les deux hommes. Alors que Vladek pédale sur son vélo d’intérieur pour ses problèmes cardiaques, il commence à raconter les années florissantes de sa jeunesse. Il était bel homme avec un avenir prometteur et toutes les femmes à ses pieds. Une seule d’entre elles a atteint son cœur, c’est la maman de l’auteur, Anja, une fille brillante et de bonne famille.Le jeune couple juif alors marié, mène une vie agréable : Vladek a une usine grâce à son beau-père, Anja met au monde un garçon nommé Richieu, ils sont des plus heureux. Malgré tout le bonheur que la vie leur offre, Anja est tombée dans une terrible dépression et le couple a dû se rendre dans un sanatorium. Début 1938, alors que les jeunes parents se rendent en Tchécoslovaquie afin de soigner Anja, ils ont traversé une petite ville dans laquelle un grand drapeau nazi flottait dans le ciel. C’était la première fois que Vladek en voyait un de ses propres yeux et il ne l’a jamais oublié. Après leur retour, des émeutes se pavanent fréquemment dans les villes de Pologne, profanant des insultes envers les Juifs. Jusque là, rien de trop dramatique, les inquiétudes ont commencé à se faire sentir lorsqu’une lettre du gouvernement a annoncé que Vladek est de réserve dans l’armée et qu’il doit quitter sa famille pour le front. C’est le matin du 14 août 1939, la guerre a éclaté. Après avoir vécu des choses dures, avoir été prisonnier de guerre, il a réussi à rejoindre sa famille. Lorsqu’il rentre, un nouveau règlement est instauré pour les juifs, des tickets pour la nourriture, un couvre-feu et le port de l’étoile de David. En 1941, ils ont fini par être déportés dans un ghetto et ont vécu à 12 dans un 2 pièces et demi. Grâce aux relations de Vladek, ils ont pu se nourrir avec un peu plus que du pain rassi et ses talents d’ingénieur ont permis la création de bumkers très bien pensés qui les ont sauvés à maintes et maintes reprises. Plus le temps passe, plus le nombre de personnes dans la famille diminue, les grands-parents, les parents et même les enfants sont séparés. Seul Vladek et Anja ont réussi à s’enfuir du ghetto et à rester en vie. Fuir la Pologne est le dernier espoir de survivre. Alors qu’ils s’attendent au paradis hongrois, ils sont acceuillis par les portes sombres de l’enfer.
Le premier tome de Maus est un véritable chef-d’œuvre. La sensibilité et la finesse des dessins adoucissent la dureté du sujet abordé et le fait que les personnages ne soient pas illustrés sous les traits d’un humain rend l’histoire plus intrigante. Au début, on pense que tous les personnages seront des souris, mais enfaite chaque rôle a son animal : les Juifs sont des souris, les Polonais des cochons, les Allemands des chats, les Américains des chiens et les Français des grenouilles. L’idée est très ingénieuse car seul l’Homme est capable de commettre des atrocités pareilles. Les animaux peuvent être proie comme prédateur mais jamais ils ne tueront 6millions d’entre eux parce qu’ils considèrent certains comme toxiques. Si vous vous intéressez à la Shoah mais ne souhaitez pas lire de longs témoignages sanglants, je vous en prie, lisez cette bande dessinée. Ce livre est aussi informatif et passionant que n’importe quel documentaire. Certes, il n’est pas écrit dans un très bon français, mais cette familiarité nous rapproche des personnages et de leur histoire. L’auteur a également illustré des instants qu’il passe avec son père, plus précisément, ceux où il raconte son passé tragique et cela permet au lecteur de faire une pause, de changer d’univers durant quelques pages. Cettre construction permet, elle aussi, l’apaisement du lecteur. Je recommande cette bande dessinée aux personnes d’une sensibilité mesurable et qui sont un minimum informés sur cette période.
En conclusion, les victimes de la Shoah ne sont pas seulement celles qui ont perdu la vie durant cette terrible période, mais bien toutes les personnes l’ayant vécu. Etre un survivant c’est vivre avec les terribles souvenirs de la violence et de la mort constamment durant le reste de sa vie. C’est pour cela qu’ils doivent sourire à l’avenir pour cicatriser du passé.