NeuN
6.5
NeuN

Manga de Tsutomu Takahashi (2017)

Eh bah voilà, c’est reparti ; les nazis vont encore avoir le mauvais rôle ! Pourquoi Diable toujours se focaliser sur le négatif ? Je vous le demande. Parle-t-on assidûment de Dresde, Hambourg, Berlin, Caen, Hiroshima et Nagasaki quand il convient de célébrer la victoire des forces alliées cela, pour le seul plaisir de se battre la coulpe ? On le ferait si Dudule l’avait gagnée, l’autre guerre. Mais il a loupé son coup l’animal, aussi Auschwitz nous sera conté et décliné en autant de chroniques et produits dérivés qu’il soit possible d’articuler ; histoire de nous rappeler qu’en face, tout de même, ils étaient très méchants quand nous, bienveillants dans les bombardiers survolant les populations civiles, nous étions foncièrement sympathiques.


Nazi, je le suis pas tout à fait. Navré pour mes détracteurs. Le totalitarisme, je le tiens en horreur et, malgré les indéniables vertus économiques et sociales du National Socialisme, un tel appareil d’État omnipotent, entre des mains plus maladroites, aurait de toute manière immanquablement conduit à une catastrophe nationale où que ce soit. D’où une certaine défiance de ma part. En revanche, contrarien, je le suis en Diable. Car au milieu du fatras de vice dont je suis fait, il reste en effet quelques modestes bribes de chevalerie solidement incrustées dans mon A.D.N. Aussi, quand on s’emploie avec une telle hargne répétée à frapper un homme à terre – aussi répréhensibles furent certains de ses actes politiques – me voilà qui prend sa défense. Pas tant par noblesse que pour le plaisir de faire bêler les hyènes baveuses s’imaginant être dans leur bon droit au seul prétexte qu’elles se trouvent présentement du bon côté du manche.


C’est quand même pas bien charitable de pisser sans cesse sur les nationaux-socialistes hitlériens quand on conteste à ces derniers – déjà bien rares malgré ce qu’en conçoivent les fantasmes des démocrates frileux – le seul droit de contre-argumenter. Et il se sera trouvé un valeureux Japonais pour venir en plus adresser ses remontrances aux Nazis. Un négligent sans doute qui, le plus malencontreusement du monde, a probablement omis de se souvenir de quelles nations son pays fut allié en d’autres temps. Ce même pays (le Japon, pour ceux qui seraient lents à la détente) que l’ambassade nazie en Chine était venu recadrer du fait d’exactions outrecuidantes dans le Nankin. Eh, dis, Takahashi, tu voudrais pas nous faire un manga là-dessus ? Comment ? Ça demanderait une paire de couilles bien accrochées ? Dans ce cas, tape sur les Nazis, t’as raison. Tu passeras pour vertueux en étant le plus consensuel possible. C’est bien d’être un artiste engagé, surtout quand c’est pour souffler sa prose dans le sens du vent. C’est à ça qu’on mesure les vrais. Les vrais quoi ? Ne me forcez pas à l’écrire, je m’en voudrais d’être grossier.


Si au moins l’affaire avait un petit fond historique. Quand certains en sont à espérer une histoire poignante qui, bien que fictive, aurait néanmoins été ancrée dans un contexte historique solidement travaillé, les autres – dont je suis – liront ce qu’il y a à lire.

« Neun ! Tu es le fruit d’une expérience eugéniste faisant de toi… l’un des treize fils d’Hitler ! ».

Se succèdent ensuite quelques curieux enchevêtrements de détonations, entre autres explosions farfelues et improbables pour tracer le sillon de nos protagonistes.


On aura beau me présenter un nanar avec un cadrage somptueux… je verrai toujours le nanar. Car il faut bien le dire – et même le répéterle dessin de Takahashi Tsutomu, c’est encore une vaseline bien visqueuse qui fera avaler n’importe quoi à qui n’y prend pas garde. D’évolutions (Alive!) en évolutions (Sky High) jusqu’à la consécration, il l’aura soigné son tracé. Lui, dont les esquisses étaient jadis lourdement inspirées des griffures d’Akio Tanaka aura affiné le rendu de ses estampes pour se créer un style brut et incomparable dont le trait est forcément plaisant au regard. Mais il est chaque fois employé à si mauvais escient que je ne puis m’empêcher de le déconsidérer malgré ses vertus objectives et indéniables. J’appelle ça « l’effet Sun-Ken Rock ».


Les treize fils cachés d’Adolf Hitler… Rien qu’à l’écrire, un rictus hilare m’assaille lèvres et cordes vocales. D’instinct, cela m’évoquait les noms stupides des groupes d’antagonistes venus nous faire la danse du ventre le temps de Samurai Deeper Kyo. « Les quatre empereurs », « Les douze dieux », « Les chevaliers de la croix rouge », « Les quatre anciens », « Les cinq étoiles filantes », « Les dix braves de Sanada » et autres « Trente-six ratons-laveur » ; tout ça participe finalement de la même couillonnerie navrante qu’on cherche ici à nous présenter avec un air sérieux.


Je remarque qu’à chaque fois qu’un dignitaire nazi nous est présenté – outre le fait que l’auteur nous rappelle chaque fois son nom et sa fonction des fois que nous soyons trop inattentifs – ils tirent la gueule ces gens-là. Des individus froids… austères… des méchants ! La présentation qui est faite d’eux est si grossière qu’on se sentirait presque de prendre sa carte du NSDAP en soutien. Qu’il verse dans la caricature, notre auteur, j’accepte… mais qu’il ait au moins la décence de l’admettre. Chaque ânerie scénaristique rapportée en ces pages avec un sérieux de pitre est à se la mordre. Mais figurez-vous que ça se veut sérieux… ce qui ne rend le fou-rire que plus tonitruant.


Sans le dessin, personne n’aurait accordé deux regards à Neun. Seulement, pour peu qu’on sache présenter un produit frelaté dans un paquet cadeau scintillant, le crétin sera enrhumé à raison de treize à la douzaine. Treize…. comme les treize enfants cachés d’Hitler !

Il faut en rire, je vous assure, sinon les nerfs ne tiennent pas.


Nos protagonistes… entre des enfants innocents et insipides bientôt bouffis de grands airs ; ce brave Teo dont le « T » du prénom est probablement tiré de Terminator tant il roule sur tout ce qui se présente sur leur chemin – ça n’est que la S.S après tout – et une métis germano-japonaise armée d’un katana – dans Allemagne des années 1930 – je vous dirai que c’est pas fameux ce qu’on nous sert là. Le nanar s’accomplit en toute page sans jamais s’assumer. À voir comme les nazis galèrent à éliminer deux freluquets et une gourgandine, on ne s’étonnera pas qu’ils aient perdu la guerre. On se demandera même comment ils ont fait pour tenir près de six ans avant d’abdiquer.


Rien ne se passe à longueur de chapitres et tout y est convenu. L’œuvre, je le crois, aurait pu être comprimée pour ne plus faire que la moitié de l’épaisseur qui est présentement la sienne. Takahashi Tsutomu est un coutumier du fait ; de ces pages où rien ne se dit, où rien ne s’expose même, mais où tout se contemple sans trop que l’observation qui nous soit imposée ne s’avère pertinente. Rien ne se dit, mais quand les paroles fusent, ce n’est que pour nous faire regretter le silence. Entre des répliques dignes d’un film d’action Américain – et pas un bon – ou des menaces aussi ridicules que les révélations qui nous parviendront, il ne faut pas croire que ce qu’on tient entre les mains ait quoi que ce soit de pertinent à révéler. Et pourtant, ça persiste à se donner des grands airs.


Neun est un Inglorious Basterd plus immature encore qu’a pu l’être celui commis par Tarantino. Rien que les couvertures des tomes devraient nous en convaincre. On dirait Gantz transposé au IIIeme Reich. Nos protagonistes vont donc casser du nazi parce que comprenez bien, lecteurs, que ces nazis… ce sont tout de même de mauvaises gens. Contrairement à nous. Ainsi, leur délivrer la mort est chose correcte, car ils n’ont pas d’âme. Les gentils… ils sont vertueux… mais à un point… et ces nazis… ô ces nazis… mais qu’est-ce qu’ils sont méchants ces animaux là. C’est à se demander comment la population locale a pu les supporter et même les plébisciter pour leur accorder graduellement tant de pouvoirs. Que chacun, surtout, s’abstienne de se renseigner sur ce que fut la République de Weimar et que personne, jamais, ne s’intéresse à l’évolution du taux de chômage et de la condition sociale durant cette période. Ce… ce serait fasciste. Le quotidien de l’Allemagne nazie ? Des expériences secrètes honteuses sur des cobayes humains et du massacre de juifs. Il se sera rien passé d’autres durant la période. Rien vous dis-je !


La manière dont l’auteur – qui n’a pas fait une once de recherche sur l’époque ni le lieu – nous rapporte comment certains, dans la population allemande, en sont venus à soutenir Hitler, est à hurler de rire. Hitler, cet homme aigri et revanchard, a réuni autour de lui toute l’acrimonie des « fachos » qui voulaient simplement se la péter pour hurler au monde qu’ils étaient meilleurs. Les auteurs de fiction qui nous parlent du IIIeme Reich ont tous cette magie en eux qui les conduit à évoquer la période… sans jamais la présenter pour ce qu’elle était ou nous rapporter ce qui la précédait. Ils font de l’histoire, mais s’interdisent des dates, des documents et des preuves. Faudrait pas non plus ennuyer son lectorat. L’iniquité absolue du traité de Versailles ? L’occupation scandaleuse de la Ruhr et son cortège de viols ? La famine ? L’inflation délirante ? La pauvreté endémique qui, dans les grandes villes, poussait des mères à se prostituer pour subvenir aux besoins de la famille ? Le festival ininterrompu de la dépravation sexuelle ? Magnus Hirshfeld et sa cohorte d’idées neuves ? Le pouvoir autoritaire sans cesse grandissant de Weimar qui a ensuite échoué entre les mains du NSDAP, car oui, la concentration des pouvoirs date de 1931, entre autres joyeusetés ? Détails que tout cela. Les Allemands ont plébiscité Hitler parce qu’ils étaient stupides, cruels, ignorants ou bien les trois à la fois. Il n’y a aucune autre explication valable et Takahashi Tsutomu est heureusement là pour nous le rappeler.


Aussi est-il bon d’avoir des auteurs du bout du monde – qui plus est issus d’un pays spécialisé dans la négation de crimes de guerre – pour se faire les relais de nos bons démocrates locaux. Des fois qu’on ait oublié à quel point les nazis étaient kré kré méchants quand tous ceux qui s’opposent à eux, en ce qui les concerne… sont fondamentalement vertueux. Moi aussi je suis un gentil, oh ! Voyez-y voir :


« Hitler ! Tu es un homme déplaisant ! Et je te suspecte d’avoir un préjudice contre les juifs. Sache que je désapprouve cela. Car c’est mal. »


Ça y’est, me voilà devenu un homme bien. Je reste foncièrement la même ordure… mais estampillée anti-fasciste ; donc éminemment respectable de par cette seule attribution.

Téo passe sont temps à arpenter les rues déguisé en S.S. Doutez-vous bien que si ça n’a pas fonctionné dans La Vache et le Prisonnier, les chances que cela puisse advenir dans le monde réel sont assez faibles. Mais rappelons que le système totalitaire du IIIeme Reich était franchement inéficient. Sauf quand il ne l’était pas. C’est à l’avenant des historiens et des mangakas… faut pas chercher à comprendre, il faut simplement acquiescer benoîtement à tout ce qu’on nous dit pour prévenir la résurgence du nazisme.


« J’ai le sang d’Hitler… le sang d’un démon » sera une ritournelle assez amusante énoncée par Neun. Le gènes jouent un rôle dans ce que nous sommes, c’est entendu, mais ils ne sont pas sur-déterminants en chaque aspect qui sera amené à constituer notre personnalité. Tous les lecteurs de Neun – la majorité en tout cas – connaissent leurs parents et savent, de ce fait, qu’ils ne sont pas leurs parents du fait qu’ils partagent des caractéristiques génétiques avec eux. Malgré lui – parce qu’il n’est pas franchement malin – l’auteur valide ainsi la thèse du caractère proéminent de la race sur toute autre caractéristique humaine. Si on a le sang d’Hitler, on aura les vues politiques d’Adolf Hitler. C’est très con comme raisonnement, hein ? Ce sera le socle même de Neun.


Le docteur U – qui est un fieffé gredin ! – multiplie les projets cruels parce que nazi. Ainsi, il lui prend l’envie de tuer tous les enfants de neuf ans – avec de l’insecticide – dans une ville entière pour mieux procéder dans sa traque. Et aussi pour le fun. Car sachez que si les nazis tirent tout le temps la gueule, le sourire leur vient aux lèvres quand il est question de faire souffrir des innocents.


Rappel : Les nazis sont des individus méchants, cruels, iniques, démoniaques et maléfiques et ils avaient tous un petit kiki. Ceci n’est pas une opinion ou un mantra religieux, c’est rien que la vérité que je vous dis. La propag… l’Histoire et la fiction, dans les démocraties de marché pures et immaculées, l’ont démontré maintes fois depuis. Mais elles ne nous le rappelleront jamais assez !


Vous pensez qu’après avoir entamé son œuvre au quart, monsieur Tsutomu aurait déjà exploité le gros du potentiel à conneries dont recèlent ses méninges ? Enfants de peu de foi… les histoires des fils cachés d’Hitler ne sauraient en effet être recevables à moins de les assaisonner de pouvoirs magiques. Oui. Voilà qu’arrive la synchronisation.


Plus je lisais, et plus je révélais ce qu’était, au fond, Takahashi Tsutomu. Avec son déballage obscène d’antifascisme de carnaval, je mesurais avoir sous les yeux un Tetsuya Tsutsui dont le seul mérite sur ce dernier tenait au fait qu’il savait mieux dessiner. Neun ne tient apparemment debout que parce qu’il s’appuie sur des béquilles faites de graphismes que l’on croyait d’abord soignés pour vite découvrir qu’ils étaient spécieux. Il y a, dans cette œuvre, le fantasme d’un casseur de nazis qui, en d’autres temps, se serait pourtant bien plu à être leur allié. La veulerie militante s’exhibe dans toute sa forfaiture dont elle suinte ici jusqu’au dernier bubon.

Les protagonistes sont toujours les plus forts. Y’a pas d’adversité dans le fantasme qu’on nous présente, rien que le déballage idiot de chimères vomies sur du papier blanc. C’est digne de l’ouvrage d’un collégien qui, tourmenté par ses camarades, les dessinerait en train d’être vaincus par son avatar fantasmé. Voilà qui devrait en appeler à la pitié plutôt qu’à la colère ; je me situe pour ma part pile au juste milieu pour m’en tenir au mépris. Un Shônen commercial est dessiné pour de mauvaises raisons, pour n’être au final construit qu’à partir de déjections encrées… mais les auteurs de ces immondices, pour nombreux qu’ils sont, nous épargnent au moins la posture engagée. Lorsqu’on se complaît dans la cuistrerie, la moindre des choses consiste encore ne pas se prendre au sérieux. Ce que Takahashi Tsutomu s’emploie pourtant à faire en toute occasion.


Imaginez que Jean-Marie Poiré ait réalisé le film Les Visiteurs avec l’intention d’en faire un film mêlant science-fiction – pour le voyage temporel – et histoire – pour les protagonistes – en s’imaginant avoir donné naissance au nouveau Citizen Kane. Une fois que cette image vous sera parvenue au fond de la caboche, alors, vous saurez ce qu’est Neun, fondamentalement ; une blague qui s’ignore à force de se grimer derrière les traits d’un drame qui fait rire à ses dépends.

Et puis il y a la Pologne. Ooooh ! La pauvre Pologne qui a été victime de l’arbitraire nazi. Cette même Pologne dont le couloir de Dantzig faisait évidemment partie de son territoire depuis des temps immémoriaux. Encore une fois, faire de l’Histoire sans rapporter ce qui est advenu par le passé tient du génie. La guerre a éclaté sans raison autre que la méchanceté des nazis. Car si ce n’est eux, dans le reste de l’Europe, on ne trouvait alors que des oies blanches.


Ce manga n’est bientôt plus qu’une succession de plans esthétique où on essaye de faire briller la classe au milieu de la crasse. Tout dans la posture, rien dans l’écriture. C’est un peu plus navrant chapitre après chapitre. Et le plus beau, c’est que rien ou presque ne se passe ; il y a des chapitres entiers écrits pour rien et qui n’apportent pas même une once d’élément à l’histoire qui s’écrit… bien péniblement. On passe par exemple trois chapitres avec deux enfants dans un four.

« La doctrine nazie est simple, il suffit de supprimer tout le sentiment de fraternité entre les Hommes »

C’est fou d’être dans le déni à ce point là. Hitler, à en lire ses détracteurs, était un méchant signé Walt Disney. Petit retour sur l’histoire… il en faut. Alors que Weimar était en proie aux conflits incessants entre S.A, communistes, sociaux démocrates et la police, que la misère faisait ramper l’Allemagne toute entière, le NSDAP a redonné espoir à une population au fond du trou en faisant poindre un oasis dans le désert. Même des syndicalistes Socialistes français, comme Francis Delaisi, décrivaient la réussite économique de l’Allemagne nazie et se pâmaient de cette dernière. Quand l’Europe était déchirée par la lutte des classes, l’économie nationale-socialiste avait abouti à un système de collaboration de classes… qui fatalement était vecteur de fraternité plus qu’aucun autre modèle économique au monde. L’étalon-travail institué par Hjalmar Schacht – à qui Hitler devait le caractère florissant de l’économie allemande – a simplement révolutionné le système économique comme jamais. Les pontes économiques ayant étudié Schacht – de son surnom Le Magicien – s’accordent d’autant mieux à reconnaître que cet homme fut un génie du fait qu’il s’était éloigné des nazis avant la guerre. En outre, le national-socialisme a faire rebondir la natalité et entretenu une politique familiale dans un pays rendu exsangue et où on ne faisait plus d’enfants du fait d’une absence de confiance en l’avenir. Pour l’annihilation du sentiment fraternel entre les hommes, alors que des fratries entières étaient littéralement parvenues à éclore par milliers et que chacun communiait autour d'un pouvoir central renforcé… c’est fort.


Vous souhaitez en savoir plus sur l’époque sans que le pédantisme de Raphaël Enthoven (qui a renoncé à débattre avec un révisionniste national-socialiste parce qu’il avait piscine) ne s’interpose entre vous et votre prise de connaissance ? Essayez-vous à la lecture de La Révolution Européenne de Francis Delaisi ou Mémoires d’un magicien, la biographie de Hjalmar Schacht. Ni l’un ni l’autre n’étaient nationaux socialistes allemands, vous achèverez ainsi votre lecture les mains propres. Vous remarquerez alors que si on a beaucoup péroré sur Dudule et ses copains durant les événements de la guerre, et uniquement évoqué sa politique étrangère, on a malencontreusement omis de rapporter ce que furent six années de national socialisme appliquées à l’économie allemande, à l’époque ruinée comme aucun pays ne l’avait jamais été auparavant. Tout porte à croire que si l’aventure avait continué encore cinquante ans, des tares et des failles auraient fini par se concrétiser dans ce modèle… mais les bombes anglo-américaines – d’où il émane un amour inconditionnel de son prochain rappelons-le – nous aurons empêché de savoir ce qu’il en serait. Les artistes qui vous causent politique… Chez nous ou sur une archipel au loin ; c’est toujours la même ineptie. Il y a tant à éponger derrière, entre les traces salissantes des mensonges, des poncifs et des lieux-communs, tous étant en plus emplis de pathos et dépourvus du moindre argument de fonds. Quant à la nuance, vous lui direz « adieu » avant même de pouvoir lui souhaiter la bienvenue.


Oh les poncifs ; ces phrases creuses qui cherchent à simuler la consistance – et bien mal – tout ça concourt perpétuellement à faire de Neun un manga qui pète plus haut que son cul et dont chaque flatulence laisserait jaillir un monceau de merde qui nous atterrirait chaque fois dans les yeux. Vous vous représentez bien ces crâneurs qui se donnent de l’importance, se figurant profonds parce qu’ils ont cité une ânerie pompée sur le premier Skyblog venu ? C’est aussi ça, Neun. C’est tant de choses à la fois, mais rien de bien n’en surgit jamais.


«Beau et con à la fois» ; cette seule synthèse, tirée des vers du poète, suffit non pas à résumer l’œuvre, mais à la situer dans son intégralité.


Si l’acuité critique de l’auteur vis-à-vis de l’histoire est aussi précise avec Neun qu’elle le fut avec Sidooh, je crois avoir à remettre en question bien des assertions qui me furent rapportées alors.

La fin, on en parle ? On ne devrait pas. Se moquer des handicapés, c’est tout de même pas des choses à faire. Comment ? Takahashi Tsutomu, cliniquement, serait sain d’esprit ? Voilà qui en dit long sur la psychiatrie moderne. Le fantasme continue, sans bride et sans frein, dans sa plus pure absurdité. Neun, sans même qu’un de ses cils ne soit mis en danger, met à l’amende les nazis par centaines, grâce à des pouvoirs ESP dont aucun fou rire ne suffira pour évacuer tout ce que le ridicule de la chose a eu d’effet sur mes nerfs. Et la bagatelle, toujours avec ces petits airs supérieurs chez chaque personnage, tous esthètes, même dans la guerre, faits de faconde et de faux airs, assénant conneries page après page, jusqu’à ce qu’enfin, le manga se trouve une conclusion, bâclée à l’image du reste, nous délivrant enfin de la peste.


Le manga, au mieux – dans les plus infinies largesses – vaudra un 3/10 pour qui pourvu d’un esprit critique le subira. Mais le note minimale lui va si bien au teint que je me serais senti bien coupable de ne pas la lui administrer. Après tout, il suffit de rajouter un « un » à Neun pour en faire un dix. Perdu que l’auteur fut dans le fantasme tous azimut, celui-ci pourra alors rêver de la note maximale alors que je le sanctionne de la pire qui soit.


Après une œuvre pareille sur l’Allemagne nazie, à mon tour, je me sens de scander « Plus jamais ça ! ».

Créée

le 21 août 2024

Critique lue 215 fois

6 j'aime

3 commentaires

Josselin Bigaut

Écrit par

Critique lue 215 fois

6
3

Du même critique

Hunter x Hunter
Josselin-B
10

Éructations fanatiques

Nous étions le treize avril de l'an de grâce deux-mille-six, j'avais treize ans. Je venais de les avoir à dire vrai ; c'était mon anniversaire. Jamais trop aimé les anniversaires, il faut dire que je...

le 20 juil. 2020

62 j'aime

159

L'Attaque des Titans
Josselin-B
3

L'arnaque des gitans

Ça nous a sauté à la gueule un jour de printemps 2013. Il y a sept ans de ça déjà (et même plus puisque les années continuent de s'écouler implacablement). Du bruit, ça en a fait. Plein, même. Je...

le 8 avr. 2020

34 j'aime

60

Monster
Josselin-B
10

Critique sans titre pour un Monstre sans nom

Il s'agit là du premier dix que je suis amené à délivrer pour une des œuvres que je critique. Et je n'ai pas eu à réfléchir longuement avant d'attribuer pareille note ; sans l'ombre d'une hésitation...

le 17 janv. 2020

33 j'aime

14