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Bon, je devais bien me douter du style Yaoi juste en voyant la couverture, mais je ne pensais pas qu'on allait s'enfoncer dans quelque chose d'aussi toxique.

Cadre de base, nous avons deux "héros", Nomi, qui incarne le "Mâle alpha", celui qui est assez grand, avec un visage très asiatique, des cheveux noirs et qui a une grosse queue ( je n'invente rien, on dit même de lui qu'avec un tel organe, il est "Un vrai japonais"). Shiba pour sa part, est frêle, doux, petit, il ressemble à une fille ( donc "Kawaii", mignon), blond aux yeux bleus avec un visage européen et bien sur, il s'est travestie en fille une fois ( Pourquoi? bonne question). C'est d'ailleurs pour ça qu'il se fait harceler par tout le monde. Les deux jeunes hommes sont partenaires de chambre au même internat et comme ils ont le béguin l'un pour l'autre, ça fait suer tout le monde qu'ils ne se déclarent pas. parce que franchement, ça crève la page!

J'ai un problème avec les Yaoi, enfin, un élément précis du style Yaoi, qui se retrouve aussi dans beaucoup trop de shojos: le harcèlement sexuel [ banalisé et romantisé ]. Il s'articule souvent avec la logique suivante: "Tu es trop mignon, c'est ta faute si je me perverti et que j'ai envie de te faire des choses". C'est une logique tellement stupide et qui me rappelle les excuses des hommes violents, "C'est de ta faute si je te bat, tu me fais enrager". Vous voyez le genre. Ensuite, je ne calcule plus les comportements inadéquats vus dans ce livre. Il y a le fait qu'on impose à Shiba des robes, qu'on le presse de baiser Nomi, qu'on l'accule dans un coin comme une petite sourie ( C'est ce qu'on appelle une "entrave physique", c'est considéré comme une agression), qu'on lui agrippe le bras, qu'on lui a baisser son pantalon et lever son chandail en même temps pour démontrer à un des élève qu'il est bien un gars, qu'on l'ait enfermé dans la douche avec Nomi ( complètement nu, avec raisons) en leur disant qu'ils ne sortiraient pas tant qu'ils n'auraient pas baisé ensemble, etc. C'est tellement dégradant et incorrect, je ne comprend pas comment on peut trouver ça sexy et romantique de mettre autant d'acharnement sur quelqu'un juste "parce qu'il ne se déniaise pas à baiser". Aussi, dans une scène, Shiba se voit "obligé" d'embrasser le dude le plus harcelant à son endroit. Et que fait notre Shiba tout mignon? Il court embrasser Nomi pour ensuite embrasser monsieur Harceleur-dont-je-me-fous-du-prénom. Que penser d'un comportement comme ça? Je veux dire, où est le "NON" que Shiba avait tellement envie de dire? Pourquoi consentir à faire des choses qu'on ne veut pas, surtout en contexte de pression sociale? Pourquoi forcer un autre à l'embrasser si clairement ça semble ne pas lui convenir. Bref: Il est où le respect là-dedans?? Et bien sur, pas d'adultes pour remarquer tout ça et mettre fin à tout ce bordel.

Il n'y a pas que ça, hélas. Outre la présence de harcèlement physique et sexuel, on a aussi des idées très machistes et ce qu'on désigne communément comme de la masculinité toxique. Ça se rapporte aux éléments évoqués plus haut, mais aussi à cette idée du "Mâle protecteur". Observez que Shiba, celui qui s'est travestie en fille, tiens aussi un "rôle traditionnel de fille". Un vieux stéréotype de genre qui consiste à donner aux filles le rôle de "petite créature fragile qu'il faut protéger des autres, mais aussi d'elle-même" ( parce qu'elle attire trop les mâles avec sa mignonnerie et qu'elle est aussi trop stupide pour savoir gérer ce genre de situation). ( Soupir) Mais c'est n'importe quoi! Bref. Shiba est à ce point "fragile" qu'il se laisse faire, en protestant mollement, mais incapable de ne pas se faire harceler. Il faudra le mâle dominant ( le "Vrai japonais"), Nomi, pour sauver cette pauvre petite sourie qui est à la merci des pervers, des amateurs de "Boy love" et de l'amateur de travesties. Bravo pour le consentement! [ Notez le sarcasme]

L'autrice laisse cette note au début: "C'est une histoire un peu bébête". Ouais, en effet, mais le "bébête", ça peut s'apprécier. Mais pas ce genre de situation malsaine, pour ma part. On travaille trop fort au Québec à déconstruire ce genre de conneries pour que j'adhère à ce genre de chose. Il me semble que le Japon a du retard, pour sa part, de s'attaquer aux stéréotypes, au rapport de genre inadéquat et inéquitable, mais surtout de ce qui concerne le harcèlement sexuel. Certains mangas, dont "En proie au silence", de Akane Torikai, font précisément ça, dénoncer les rapports toxiques, la violence sexuelle et le harcèlement sexuel.

Dernier point sur ce sujet, on a droit à des répliques vraiment dérangeantes, comme celle-ci:

Nomi: "Shiba est malade"

Pervers 1 et Pervers 2: "T'avais qu'à pas le remplir de ta semence".

Je ne sais pas ce qui me lève le cœur le plus: le fait que je ne vois pas en quoi être "rempli de sperme" rend malade ou le fait que deux obsédés aient eu la même réflexion en même temps.

Il y a vaguement cette idée d'homosexualité à moitié dans le placard, mais qui sera vite transformé en sortie dudit placard, sans trop de stress de la part de Nomi. Shiba a tenté mollement de faire croire qu'il aimait les filles "À grosses boules" ( oui, parce que les vrais mâles aiment le gros nichons, c'est bien connu- Notez le sarcasme), mais c'était presque aussi crédible qu'un tweet de D.Trump. Donc, rien de très pertinent pour aborder le "coming out".

Seul point positif: Au moins, Shiba n'a jamais été agressé par Nomi et ses réflexions, bien que peu profondes, restent pertinentes, surtout pour un Japon qui en arrache sur la question de l'homosexualité.

Honnêtement, ce manga me faisait penser à ces shows de télé où des "mâles" musclés, macho et imbéciles draguent des filles pour gagner de l'argent, avec une pelletée de personnages masculins superficiels et un brin pervers qui n'ont vraiment rien de mieux à faire que de fantasmer sur un duo de gars dépareillés, quitte à les mettre mal à l'aise, à se montrer harcelants et employer la violence sexuelle. On est vraiment plus près des New Romance de romans porno que de la romance, qui est beaucoup plus malsaine et teintée de violence.

Les dessins ne sont pas mal, je concède ce point, mais bourrés de clichés assez indigestes. La profondeur émotive est de surface, les questions existentielles réchauffées et redondantes, l'intellectualité proche du zéro absolu. Bref, ce n'est pas du tout mon genre, mais sans la toxicité, ça aurait mieux passé. Et comme je n'ai lu que quelques séries "yaoi", plus par erreur que par intérêt. Je ne peux pas savoir si c'est là une œuvre assez standard pour le genre ou que vraiment celui-là est plus toxique que les autres. Pour le peu que j'en sais, l'idée de la domination et du flirt qui ressemble à du harcèlement restent des éléments souvent employés. Et que ce soit chez les gay ou les hétéro, la domination et le non-respect du consentement, c'est malsain.

En clair, je crois que puisque que nous dénonçons la culture du viol des femmes dans le milieu culturel, de fait, l’utilisation de la violence sexuelle fait aux hommes ne devrait pas non plus servir à des fins de divertissement.

Pour un lectorat jeune adulte, 17 ans+.

Créée

le 10 janv. 2024

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Shaynning

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