Aujourd’hui, j’ai vu un esclave devenir plus puissant que les 4 seigneurs Nains

Une légende raconte que le peuple nain fut créé avec ce qu'il restait d'argile primordiale après que celle-ci eût servi à façonner les elfes. Déçu par leur petite taille en raison du manque de terre glaise, Yjdad décida de compenser ce handicap en leur donnant le courage, la résistance et le secret de la forge. Mais le dieu des elfes, Arran, inquiet que ce nouveau peuple puisse contester la suprématie de ses propres enfants, glissa trois malédictions dans l'argile encore humide... L'avidité... L'ambition... Et l'obstination. Ainsi, le dieu des elfes s'assura que jamais aucune alliance naine ne résiste au temps.

Avec Oösram des Errants, les éditions Soleil sous la plume du scénariste Nicolas Jarry présente le quatrième tome de la saga Nains, situé dans l'univers de l'heroic fantasy des « Terres d’Arran » qui s'inscrit en parallèle d'autres aventures avec '' Elfes '', " Orcs & Gobelins ", et '' Mages. " Une épopée passionnante pour tout fan du médiéval fantastique symbolisée par des tomes dont la trame se résout en un seul volume. Dans le cas de Nains, on explore le microcosme de ce peuple fier par le biais des cinq ordres composant le pouvoir de cette société comprenant : l'Ordre du Talion, du Temple, du Bouclier, de la Forge et des Errants. L'Ordre des Errants est particulier puisqu'il n'est pas considéré comme tel, étant surtout une caste mortifère regroupant les sans-ordre, des errants exclus de la société en étant privés des quatre droits fondamentaux de l'ordre Nains : forger des armes (la Forge), porter des armes (le Bouclier), le commerce et la possession d'or (le Talion), et le droit de bâtir des édifices en pierre taillée (le Temple); ne laissant comme seule autre possibilité que de travailler la terre pour les autres castes en étant soumis aux brimades, aux maltraitances et à des impôts colossaux. Des nains sans aucun droit que celui d'être exploité par la sueur, la chair et le sang.

C'est dans ce contexte que l'on suit Oösram, ancien puissant général de l'Ordre du Bouclier, banni par sa faction après avoir dissimulé au roi Doran de la forteresse-état de Gol-Garsem, un trésor appartenant aux clans Sylvains durant l'annexion des sept îles de l'estuaire du Fleuve-Dragon. Rabaissé dans son amour-propre, violenté dans sa chair, destitué de tous ses biens et de toutes dignités, jusqu'au nom de sa famille rayée des livres d'histoire de guerre, il emporte dans sa déchéance sa famille pour devenir un Errant. Oösram des Errants est un récit de guerre fascinant dans une relecture formidable de l'esclavage dans la Rome antique, qui jouait un rôle important dans la société et l'économie romaine. Des esclaves considérés comme des biens en droit romain n'ayant aucune personnalité morale. Un point que le scénariste parvient habilement à retranscrire. Le personnage d'Oösram est un écho palpitant du général romain déchu : ''Maximus'', vu dans Gladiator par Ridley Scott, que l'on pourrait également concilier avec l'éponyme : ''Spartacus'', en tant qu'esclave qui se rebelle contre un terrible pouvoir dans un combat perdu d'avance où le symbolisme de la liberté prend son essor par le sacrifice de la bataille.

- Je suis le chef de cette famille, et j'ai une déclaration à faire !
- Une déclaration ?
- Oui... Je déclare la guerre aux quatre ordres dominants. Une guerre à mort.

Une bande dessinée exaltante où l’oppression et la révolution est l'apanage de cette histoire forte en symbolique et en valeur familiale à travers des personnages charismatiques et attachants. Un récit dramatique difficile qui laisse également la part belle à des rebondissements engageants. La stratégie de guerre est essentiellement mis en avant par des affrontements de masses édifiantes qui laisse peu de place à des longs duels, mais cela ne vient nullement amoindrir la pièce de guerre qui se joue. Finalement le seul défaut de ce volume est de ne pas contenir suffisamment de pages pour étaler une intrigue qui aurait mérité plus d'expositions. Les dessins de Jean-Paul Bordier sont soignées avec des effets de lumière qui posent un contraste satisfaisant sur des décors impressionnants. Des plans superbes qui alimentent efficacement les vignettes par des photos panoramiques grandioses qui offrent une véritable identité visuelle aux Terres d'Arran. Que ce soit l'estuaire du Fleuve-Dragon, la forteresse-état de Gol-Garsem, la ferme d'Oösram, ou encore les magnifiques hauts plateaux avec le village caché dans les flancs d'une montagne. Si ce monde n'était pas si dangereux, j'aurais adoré y plonger !

CONCLUSION :

Oösram des Errants des Éditions Soleil, en tant que quatrième tome des aventures Nains situé dans l'univers des Terre d'Arran est une bande dessinée absorbante, enivrante et poignante, autour d'une relecture brûlante de l’oppression romaine avec un personnage central édifiant menant une révolution engageante dans la droite lignée des grandes figures héroïques que furent Maximus et Spartacus. Un récit tragique doté d'une portée sociale sur un sens du sacrifice bouleversant, autour d'un général déchu devenu le père symbolique de tout un peuple persécuté. La reconnaissance d'un droit fondamental : celui de devenir un Ordre à part entière afin de ne plus être soumis à l'esclavage. J'espère que dans une prochaine aventure l'on retrouvera Dröh en train de poursuivre cette bataille pour la liberté commencé par son père, Oösram.

Après un 3e tome confus, la saga Nains revient en force avec Oösram des Errants !

• Ça sera lent et douloureux, mais un jour quand le moment sera venu, les Errants pourront de nouveau avoir les mêmes droits que les autres... Et c'est à notre père qu'ils le devront. Tu comprends ?


• Oui... Je comprends que la guerre continue et qu'un jour ça sera à moi de finir ce qu'il a commencé ! Nous étions argile et nous redevenons argile. Nous étions enchaînés et nous redevenons libres.