Quatre mois après un premier volume remarqué, la suite de Père & Fils, disponible depuis le 23 juin aux éditions Ki-oon, confirme tout le bien que l’on pensait déjà de ce très doux manga évoquant le difficile apprentissage de la paternité. Un portrait tout en délicatesse d’un jeune papa et de son petit garçon qui se découvrent à la suite d'un drame. Touchante mais jamais déprimante, cette histoire imaginée par la Japonaise Mi Tagawa (dont c'est le premier manga) est un petit bijou de sensibilité et de justesse.
De quoi ça parle ?
Après la mort de son épouse, Torakichi, un jeune herboriste itinérant toujours en déplacement, décide de s'occuper de Shiro, son fils de trois ans qu’il connaît à peine. Tous les deux, ils partent ainsi sur les routes apporter aux clients malades les plantes dont ils ont besoin pour se soigner. Mais comment concilier ce travail épuisant avec l’éducation d’un très jeune enfant bouleversé par la disparition de sa mère ? Au fil des longues marches de villages en villages dans ce Japon pré-moderne, Torakichi se retrouve confronté à des situations qu'il n'avait pas imaginées. Son fils se réveille en pleine nuit, pleure sans arrêt sa maman, craint de perdre son papa et surtout réclame beaucoup d'attention et d'amour. Des gestes et des mots tant attendus que Torikachi, aussi maladroit que touchant, peine à trouver.
Car si Torakichi est un herboriste hors pair, incollable sur les plantes médicinales qu’il prescrit à ses patients, le jeune père s’y prend mal avec son fils. Heureusement, le duo, épaulé par Ieji, un yokaï aux allures de petit rapace, va croiser la route de personnages qui sauront conseiller Torakichi pour l'aider à nouer les liens manquants avec Shiro et devenir chaque jour un meilleur papa.
Pourquoi j'adore ?
Parce que Père & Fils n’est ni un guide pour devenir un père modèle, ni un manuel d’herboristerie. C’est juste un petit précis des sentiments humains qui vous fera éprouver toute une palette d’émotions. A l'image de Shiro dont Torakichi dit qu'il est "le meilleur des remèdes", Père & Fils fait du bien en prônant le dialogue et la compréhension mutuelle. Et comment ne pas être ému devant les grands yeux innocents pleins de larmes de Shiro qui ose enfin verbaliser ses angoisses en avouant à son papa : "Z’ai peur… Que toi aussi tu t’en ailles."
Outre la dimension émotionnelle, la vraie originalité de ce manga est d'avoir imaginé un héros féru de botanique. Et, comme Shiro au contact de son père, on apprend au fil des pages les vertus médicinales des plantes. Ce petit côté encyclopédique, même si on n'a pas l’ambition de devenir phytothérapeute est un vrai plus qui apporte une autre dimension à ce seinen grâce au travail très documenté de l'auteure.
Saluons enfin le dessin de la mangaka Mi Tagawa qui, malgré un trait très classique mais expressif, traduit avec beaucoup de justesse les émotions de ses personnages. Sa reconstitution d’un Japon plus ancien, tant au niveau des costumes que des paysages est parfaitement maîtrisée et soulignée par le travail d'impression soigné des éditions Ki-oon.
C’est pour vous si…
Père & Fils est l'hybride parfait entre Underwater (éd. Ki-oon), un manga naturaliste en deux tomes qui évoquait déjà un Japon moins contemporain aux accents écologiques et L'adoption (éd. Bamboo), la dernière pépite de Zidrou qui nous avait émus en abordant le thème de la filiation.
Critique publiée également sur Pop Up'.