Critique des tomes 1 et 2 de Poison City :
Ce manga est bien parce qu'il dénonce les excès d'une censure menée par des intégristes se prétendant défenseurs de la morale et du bon goût, sauf que lesdits censeurs s'avèrent être en fait des pervers malveillants, voyant le démon ou le sexe là où il n'est pas et muselant les "opposants" de façon immorale.
On voit que l'auteur ne porte pas les censeurs dans son coeur.
Y a quoi voir le portrait de ces derniers :
- La première est un décalque de Ségolène Royal, vieille ennemie des mangas : on a une vieille folle criant que l'équivalent japonais du Manneken-Pis est une "ode à la pédo-pornographie" et souhaite le faire détruire. Sauf que le discours relève de la paranoïa et de l'hypocrisie perverse, tout comme le châtiment réservé à la statue :
La statue est détruite par une foreuse, qui pénètre de façon phallique à l'arrière-train de la statue pour ressortir par la cavité avant. La scène apparait donc comme un épouvantable viol de la culture au nom de la "pureté mentale". Bref, ♫c'est dé-gueu-las-se♫
- Cette même pseudo-intellectuelle reproche à notre héros mangaka d'avoir représenté des gamins en bas-âge et des ados fumer ou s'échapper de leur maison par la fenêtre :
"Des gamins pourraient reproduire ça et se blesser !"
Franchement, rien que ça c'est le pire exemple de mauvaise foi envers la jeunesse. Ces censeurs pensent que les jeunes ne sont qu'une seule et même masse entièrement influençable et décérébrée, imitant tout ce qu'ils voient (d'ailleurs, ils ont peu de chances de lire le manga choc du héros) y compris les actes dangereux.
- On a aussi un sosie de Jean-Vincent Placé, qui comme son homologue raconte n'importe quoi (à la différence que M. Placé était bourré quand il a dit des conneries, et que sa version manga est juste de mauvaise foi).
- Ajoutez à cela un censeur au sourire narquois, visiblement machiavélique, se prétendant représentant de la morale et du bien face au "danger littéraire" des mangas et des animes. Un peu comme Eric Zemmour, qui s'en est pris au Club Dorothée pour sa diffusion de métrages japonais, les accusant de "pervertir la jeunesse" (il contribue ainsi à la "dictature de la bienpensance" qu'il dénonce tant).
- Enfin, on a un sosie du psychologue Frederic Wertham, apôtre de la lutte anti-comics reconnu pour son absence de rigueur scientifique quand il s'agissait de dénoncer la BD : un docteur dit qu'il faut piquer notre héros, parce qu'il "souffre d'une maladie qu'on ne peut citer et qui l'empêche d'être un élément sain et productif de notre société".
Cette dernière déclaration a lieu lorsque notre héros est confronté aux censeurs, l'accusant de pervertir la jeunesse et même d'être égoïste, alors que notre mangaka veut choquer pour éveiller la conscience de ses lecteurs ou sinon pour offrir un divertissement sans racoler les bas-instincts.
Ladite séance est comparé à la comparution des responsables d'EC Comics devant une assemblée de censeurs. Et ladite séance, censée être visible par tous les étudiants via TV en direct, est alors floutée pour empêcher ces derniers d'entendre la défense parfaitement légitime du héros mangaka.
Notre héros se laisse donc volontairement "condamner à mort" par ces censeurs :
Il se fait piquer voire euthanasier par un des censeurs (le docteur). Preuve que ces censeurs sont des pervers puisqu'il condamne le meurtre dans les mangas pour ne pas "choquer la jeunesse", mais ils acceptent de tuer les opposants à leurs mesures pour assouvir leur soif de censure, de pouvoir et de meurtre.
Je sais que j'ai moi-même dénoncé des mangas comme le maladroit Splatoon tome 1 et le pervers et racoleur Infection, mais c'est parce que le premier est peu inspiré et involontairement glauque, tandis que le deuxième ne cherche pas à vendre une histoire de zombies, mais à réellement exciter les bas-instincts en offrant des fantasmes sexuels douteux.
Je n'aime pas non plus Shimoneta, parce que je trouve que c'est un manga qui, au prétexte de dénoncer une censure totalitaire, ne fait que proposer un comportement obscène (vulgaire, indécent) au lieu d'apprendre aux lecteurs à être débridés, ouverts et critiques vis-à-vis d'un gouverment.
Poison City arrive là où Shimoneta échoue : montrer que la censure n'est pas forcément un moyen de maintenir la morale en sociéte, mais peut dégénérer en hypocrisie perverse dont le but est de détruire la créativité, le sens critique et de non pas imposer une "pureté morale" mais un puritanisme totalitaire.
En revanche, Poison City ne dénonce pas la "bienpensance" tant décriée par l'extrême-droite, puisqu'il faudrait déjà que les censeurs veuillent éviter de froisser une majorité ou une minorité au sein de la population, et puisque les seules personnes froissées ici ne sont qu'eux-mêmes et sont plus proches de l'extrême-droite qu'autre chose.
Poison City est un manga qui mérité d'être lu car il défend la liberté d'expression et cherche à éduquer les masses, et non à les pervertir comme Infection, ou au contraire à les brider en les "purifiant" comme tous les Eric Zemmour, les Ségolène Royal, et les puritains de la terre.
À lire !
Edit : Et maintenant, afin de créer la polémique et la controverse, voici un extrait de Manga Vidéos selon Benzaïe et ses images de "sexe, sexe, violence et monstres" pour également faire criser Ségolène et compagnie. Shimoneta peut aller se rhabiller !