Je me souviens être tombé sur le premier tome de Preacher il y a longtemps à la bibliothèque. À l'époque je ne connaissais pas trop les comics et ma culture BD s’arrêtait en gros aux éditions Dupuis (je force un peu le trait mais ce n'est pas très loin).
Et à 15-16 ans (de mémoire) ça m'avait beaucoup impressionné par ce qui me semblait être un dessin incroyable et un ton adulte comme je n'en avais jamais vu avant..
Au final, j'étais surtout naïf et inculte, et quant au dessin, ma foi je pense que c'est surtout la couverture qui a du me marquer.
Car reprendre Preacher aujourd'hui c'est se confronter à une grosse déception. Finalement ce comics est assez typique de la production de l'époque : un univers très noir et excessivement grotesque et violent. La thématique n'a finalement pas grand chose de neuf par rapport à d'autres productions Vertigo, comme Hellblazer par exemple. Le trait n'est finalement pas si mémorable.
De plus la série traîne en longueur alors qu'elle est relativement courte pour un comics. C'est particulièrement flagrant avec un changement de ton qui opère en milieu de run : les menaces ne sont plus tellement à craindre et sont surtout ridicule. Je pense en particulier à Starr qui d'inquiétant devient purement comique. Impossible de le prendre au sérieux. ou bien la tendance des auteurs à ressortir des personnages alors qu'ils n'ont plus d'utilité.
Pourtant tout n'est pas à jeter. le portrait fait de Cassidy le vampire alterne entre le sublime et le mauvais (par manque de logique). Quelques personnages secondaires valent le détour également.
Mais c'est dans leur vision d'une vie sur Terre horrifique et sans espoir que les auteurs atteignent quelque chose : leur excès de violence, de sadisme et de grotesque transcende leur intention (clairement le scénario manque de propos et d'intelligence pour que ce soit volontaire), et bien et évoque les visions de l'enfer d'un Jérome Boch. Et c'est en cela que ce comics vaut le détour.
Au final le scénariste n'est pas un branque et sait suffisamment manier sa barque pour me donner envie de savoir comment tout finit.
Ce qui ressort pour moi de Preacher, c'est une occasion manquée. Ce comics aurait pu aller beaucoup plus loin dans son propos et offrir une relecture des mythes chrétiens intelligente, assumer son aspect grotesque pour nous montrer un enfer sur Terre symbolique plutôt qu'un simple appeau à ados boutonneux.
Bref Preacher vaut sans doute un petit détour (mais pas indispensable), mais contentez vous d'un tome ou deux. Vous gagnerez du temps.