Princesse Cadance & Cie - My Little Pony, tome 4 par Ninesisters
My Little Pony : Frienship is Magic est populaire, et à ce titre, se décline sur de nombreux supports. Parmi eux : les comics. Pourtant, ces-derniers ont une particularité ; du moins, ceux écrits par Katie Cook et Andy Price. En effet, leur public cible n’est pas le même que la série d’animation dont ils sont adaptés.
La série, vous vous en doutez, vise principalement les petites filles, et c’est par hasard qu’une communauté plus âgée s’est prise d’intérêt pour ce programme. Un élément que les auteurs ont pris progressivement en compte, afin de continuer à satisfaire les deux publics ; ce qui ne me parait pas pertinent, dans la mesure où c’est bien la série telle qu’elle était pensée à l’origine qui a réussi à attirer des spectateurs imprévus. Mais c’est un autre débat.
Les comics, quant à eux, se focalisent sur ce second public, celui qui n’avait pas été anticipé.
Plusieurs points viennent appuyés cette impression. Déjà, pour ceux qui ne seraient pas totalement au fait de ce phénomène, la communauté internet a créé un important univers étendu autour de la série, en imaginant ce qui n’apparaissait pas à l’écran. Ils ont remarqué des poneys en arrière-plan et leur ont donné un nom, un passé, et une personnalité, ou se sont amusés à dépeindre le quotidien de personnages secondaires rarement mis en valeur. Et les auteurs de la série ont intégré certains de ces éléments inédits, en particulier concernant les noms (comme Derpy Hooves) ; mais, vous vous en doutez, ils ne pouvaient pas non plus tout reprendre, sous peine de perdre leur cible première. Dans le comics, ces limitations semblent ne plus exister : Lyra veut devenir humaine, Luna entretient des rapports d’amour/rivalité avec sa sœur, etc…
Autre indice : les références. La série se fendait déjà de quelques-unes – comme à The Big Lebowski, dans une scène consacrée au bowling – mais cela restait discret. Ici, ce n’est plus discret. Pire, Katie Cook et Andy Price donnent l’impression de vouloir produire une digestion de toute la popculture anglo-saxonne de ces 40 dernières années, pour un résultat qui laisse sans voix. Quand les personnages commencent à évoquer The Rocky Horror Picture Show et Ferris Bueller Day Off, ou à parodier Quantum Leap, nous atteignons des sommets dangereux. Mettre en scène des poneys leur donne des ailes et leur permet apparemment de sortir toutes les références qu’ils souhaitent.
Ceci étant dit, parlons de ce 3ème album. Il propose deux histoires : la première consacrée à Big Mac, l’autre à la rencontre entre Cadence et Shining Armor.
Big Mac, donc, doit acheter des clous à Ponyville, mais tombe en pleine fête de l’été. Bien malgré lui, ce qui devait être une simple course se transforme en grande aventure. Il sera confronté, pêle-mêle, aux inventions dangereuses des Cutie Mark Crusaders, à l’esprit de compétition de la princesse Luna – laquelle porte des t-shirts à messages aussi éloquents que « Blame my sister » ou « Eat my dust » – à une invasion de singes mutants, et même à l’intérêt marquée d’une pégase avec une sérieuse commotion cérébrale, qui imagine déjà leur futur vie conjugale. Comme le dit une des couvertures : « Ponyville devient de plus en plus bizarre chaque jour », et c’est bien ce qui va poser problème à un Big Mac étrangement cartésien compte-tenu de l’environnement dans lequel il évolue. Mais il va tout-de-même en profiter pour passer un bon moment. Cette histoire donne un bon aperçu de la folie douce qui habite la ville et ses habitants, et s’avère amusante malgré les déboires du pauvre Big Mac, notamment grâce à un humour étrangement non-sens.
La rencontre entre Cadence et Shining Armor, quant à elle, est une pure parodie de comédie lycéenne façon « années 80 », avec plusieurs personnages récurrents apparaissant avec leur look de l’époque. Nous retrouvons Cadence dans le rôle de la pouliche ultra-populaire promise à l’imbuvable capitaine de l’équipe du polo – sport plus répandu à Equestria que le football américain – tandis que Shining Armor est le nerd de service. Apparemment, sa cutie mark vient moins de sa volonté d’intégrer la garde royale, que de sa tendance à incarner des paladins dans les jeux de rôle. La fin, vous la connaissez, mais pour y arriver, il faudra que les élèves les plus asociaux du lycée s’associent pour aider un des leurs, renverser le futur roi du lycée (lequel fera une très mauvaise impression à Celestia), et le rapprocher d’une Cadence aux réactions inattendues.
Si la structure est classique, les personnalités de chacun font tout le sel de cette histoire, ainsi que les multiples références. Nous découvrons un Shining Armor coincé, une Cadence beaucoup plus entreprenante qu’il n’y parait au premier abord, et une Twilight Sparkle déjà préoccupante et obsessionnelle malgré son jeune âge.
Ce troisième album s’impose comme une excellente surprise, en tout cas beaucoup plus que le précédent. Le retour des deux auteurs phares du comics n’y est certainement pas pour rien. Non seulement ceux-ci ont parfaitement intégrés les spécificités de la série et de son univers étendus, mais ils en profitent surtout pour partir dans des délires que seuls des poneys pouvaient leur permettre. Comme mentionné tantôt, ce comics MLP:FiM ressemble à s’y méprendre à une digestion ultime de la popculture anglo-saxonne, ce qui pourrait s’avérer superflu si cela ne participait pas à générer une œuvre drôle et délicieusement agréable à parcourir. Katie Cook et Andy Price retirent le meilleur de la série pour en accentuer le délire et son utilisation de références diverses. Cela pourrait devenir indigeste à la longue, mais sur un format comme celui-ci, cela passe très bien. Dommage que tous les auteurs œuvrant sur ce titre ne se montre pas capable d’aboutir à un résultat aussi plaisant, obligeant à vérifier avant lecture qui a pu travailler sur chaque album.