Voici réunies dans une BD cartonnée les différentes vignettes proposées par Maïté Robert sur Instagram pour Mâtin. Avec d’autres artistes, tous les jours à 7h07, quelques cases sont offertes aux internautes, dans cette revue digitale détenue par Dargaud, qui illustre des problématiques telles que le féminisme et la contraception masculine. Ici, dans Procrastination écologique, c’est notre conscience écolo qui est mise en avant.
Maïté Robert est une grande angoissée qui s’est découverte un intérêt pour l’environnement sur le tard (bon, elle n’a que 30 ans). Depuis lors, son quotidien n’est qu’une succession de questionnements incessants : doit-elle se flageller pour avoir succombé à la tentation d’un hamburger d’un fast-food reconnu ? Peut-elle se dire écolo si elle continue à manger du Nutella ? De même avec les réseaux sociaux, peut-on publier tous les jours des posts et se dire responsable ?
De l’humour et de la légèreté
Par son humour et son autodérision, l’autrice met en avant les nombreux compromis qui dictent sa vie, et par là-même, la nôtre, pour lutter, à son échelle, contre le réchauffement climatique. Se prenant en (contre-)exemple, elle détaille sa vie quotidienne mêlant glandouille, travail et vie intime, avec son chat et son copain, dans un appartement parisien. Elle illustre de manière souvent juste, à l’aide d’un dessin aéré et très lisible, conçu pour le public insta, sans se prendre trop la tête, les mille et unes contradictions dont sa vie est parsemée.
Un manque de profondeur qui laisse sur sa faim
Procrastination écologique est découpé en de nombreux chapitres de 6 ou 7 pages reprenant les différents thèmes traités par Maïté Robert : les vacances, le tri sélectif, la création de savon, etc. Chacun se termine par une photo de l’autrice (ou de son chat, voire les deux). Ce procédé est ludique et facile à lire, mais peut-être aussi jugé inconséquent. On a juste le temps de voir les « bases », que l’on passe déjà à autre chose, comme un post insta, au juste. Elle n’interroge pas non plus des points qui la perturbent, mais me paraissent aberrants : réfléchir à boycotter les films à grosse production ou les soirées, car soi-disant peu « écologiques ».
Même si ce travail est salutaire, Procrastination écologique laisse sur sa faim. On souhaiterait un vrai roman graphique mêlant combats intimes, réflexion globale et luttes internationales. Excepté deux cases, vers la fin, il est peu question de l’utilité réelle de ses différentes actions. L’idéal de vie 100% écolo est une illusion chimérique ou un enfer fasciste, jamais questionnés. Partageant de nombreuses interrogations de l’autrice, je ne peux m’empêcher de vouloir aller plus loin : Pourquoi accepter cette nouvelle culpabilité ? Trier ses déchets change-t-il réellement la donne ? Comment les choses peuvent-elles bouger, à l’échelle mondiale, et non plus seulement à l’intérieur du microsome parisien ?
Critique publiée dans le Suricate Magazine : https://www.lesuricate.org/procrastination-ecologique-la-fuite-par-le-rire/