Après avoir parcouru toutes les critiques et leurs titres, on y trouve beaucoup moins l'adjectif adéquat qu'on ne pourrait le penser : "nostalgie". Pourtant, c'est vraiment le sentiment qui nous imprègne le plus dans ce roman graphique de Taniguchi.
Difficile à caser dans les mangas comme on peut le lire dans certaines descriptions, et pour ceux qui ne l'ont pas lu et qui ne connaissent pas l'auteur, on parle encore moins de SF, quoique lorsqu'on s'y frotte, on ne peut passer outre les problématiques récurrentes et systématiques liées au voyage temporel.
On découvre Hiroshi, un homme de 48 ans qui se retrouve, lors de son passage dans le village où il a grandit, renvoyé à l'époque de son adolescence. Sa mère qui vient de décéder n'est pas morte, sa sœur est encore une petite fille, et son père n'a pas encore fuit le foyer. C'est justement quelques mois avant la disparition de ce père que se situe le récit, Hiroshi va tout faire pour tenter d'empêcher cela et ainsi peut-être modifier l'avenir.
En ce qui concerne le dessin, le trait correspond effectivement à du manga, mais évidemment pas à du Seinen ou du Shonen. Non il s'agit vraiment d'un roman graphique, où l'on est plus dans la contemplation que dans l'action, avec des paysages et des cadrages parfaitement représentés.
Le sujet prête à la rêverie et à l'introspection par la projection dans le personnage, puisque chacun a déjà refait son monde avec des issues favorables pour guérir un traumatisme. Non ? Mais que faites-vous le dimanche soir ?
Le protagoniste, à l'âge où son père avait disparu, se retrouve lié aux mêmes problématiques : conserver sa famille ou refaire l'histoire avec son amour d'enfance ? Garder le train-train quotidien ou devenir le modèle du bon élève et obtenir une vie sociale riche et aboutie ?
Le cœur du sujet est là, c'est justement le souhait d'omettre ces expériences traumatisantes de nos vies pour les revivre qui nous emporte le plus ici, provoquant ainsi la mise en abîme à travers la catharsis de Taniguchi. La réponse apportée est finalement contraire au reste du récit, puisque l'on finit sur une touche réaliste : Hiroshi reprend sa place sans avoir rien pu changer.
C'est la raison pour laquelle on est envahit par ce sentiment de nostalgie in fine, la rêverie prend fin et le retour à la réalité est amer. Alors on ferme le livre, avec l'envie de pleurer, on se remet à compter les "si" pour Hiroshi, avant de s'y remettre plus naturellement pour nous-même.
Au risque de déplaire aux puristes, c'est pour l'instant le seul roman de Taniguchi que j'ai lu. Quartier Lointain est à mes yeux une référence du genre, j'ai 2 histoires à lire sur mes étagères (Le gourmet solitaire, Les années douces) et j'attends vraiment le bon moment pour les lire, sans avoir de doute sur la qualité de ces deux titres, je veux être certains d'en profiter pleinement, mais je vous dirai ça.