Chie Inudoh avec ce premier tome s’attaque à un vaste sujet : l’Égypte.
Loin des fantasmes et des rêveries, l’auteure nous livre un récit documenté de l’un des grands événements de ce pays… Focus sur la première pharaonne : Hatchepsout.
La mangaka démarre son histoire au commencement de celle d’Hatchepsout pour mieux nous dévoiler le parcours de cette héroïne au destin grandiose.
Face à un frère impétueux, imbu de lui-même, avide de pouvoir et de force, la jeune fille doit se faire une place dans une société qui a changé… Si les femmes avaient auparavant un certain pouvoir politique, leur titre n’est, dans la société dans laquelle elle grandi, plus qu’honorifique.
Dans l’Égypte de Hatchepsout elles ne sont là que pour paraître et elle compte bien se battre contre cette tradition.
Forte, douée pour le combat, intelligente, elle possède le cran et la sagesse, la compassion et la passion des plus grands dirigeants. Malheureusement, étant née dans un corps de fille, c’est son frère que l’on prépare à devenir le représentant des dieux, le nouveau pharaon.
Se heurtant à cette société qui la renvoie constamment à sa « condition », Hatchepsout se rebelle. On loue sa beauté quand elle voudrait être jugée selon les mêmes critères que les hommes, elle veut avoir la même éducation que son frère et surtout le même droit à une destinée grandiose.
Elle est la souveraine légitime du peuple d’Égypte, elle utilisera donc les codes du système pour mieux le changer : ils veulent qu’elle soit belle, elle le sera ; ils veulent qu’elle épouse son frère et le nomme pharaon, elle le fera. Elle usera de la seule arme qu’on lui accorde le droit de posséder : la beauté.
Mais en coulisses, c’est de son intelligence et sa détermination dont elle fera usage pour modifier son destin, briser ses chaînes et reprendre le pouvoir qu’on lui a refusé…
Le dessin élégant, précis et soigné, grâce au travail de détail des vêtements, des lieux et des objets, nous immerge un peu plus au cœur de l’Égypte des pharaons.
Le découpage et les traits efficaces jouent avec plusieurs ambiances.
Temporelle d’abord, car l’auteure nous plonge successivement dans le présent et le passé, pour mieux nous donner à voir l’avenir. Mais aussi psychologique, car elle mêle rapidité et langueur pour mieux nous décrire le caractère de son héroïne : l’ambiance graphique est calme et lente lorsqu’elle est en pleins doutes, nous laissant le temps de percevoir sa sensibilité et ses réflexions ; dynamique lorsque la force et la volonté de se battre reprennent le dessus.
Par son travail du dessin, Chie Inudoh complète habillement le scénario qui dans ce premier tome réussit à la fois à exposer les traditions égyptiennes, retracer l’enfance d’Hatchepsout, mais aussi son mariage, ses premiers mois de règne, jusqu’au tournant qui fera basculer son histoire.
Ce premier tome de "Reine d’Égypte" ravira à n’en pas douter les fans du manga de Kaoru Mori "Bride Stories" pour son traitement graphique et thématique, mais devrait aussi plaire à des lecteurs qui ne lisent peut-être pas de manga habituellement, ceux qui se passionnent pour les femmes "Culottées" de Pénélope Bagieu.