Discours de la servitude volontaire

J'ai attendu les vacances pour savourer en intégralité Servitude au coin du feu.
Toujours assez perturbant de tenir 17 ans de travail, 6 tomes, dans ses mains surtout lorsque le rendu final est aussi abouti. L'intégrale de la Nef des fous m'avait un peu fait cet effet. Ca doit être encore plus décontenançant pour les auteurs.
En tout cas je ne sais pas si il est vraiment nécessaire de passer 17 ans pour pondre une oeuvre aussi "jalon" que celle-ci mais on peut dire que la persévérance a payé.
L'univers est dense et intéressant, l'idée d'un tome par peuple pour commencer et développer le lore puis des tomes choraux pour faire avancer le récit est une excellente idée et le découpage tout en ellipses de l'ensemble est parfaitement maîtrisé.
David n'invente rien -mais après tout qui a la prétention d'inventer quoique ce soit tant en fantasy médiévale qu'en SF ?- mais il a trouvé la recette, l'alchimie pour servir LA bonne soupe qui puise un peu partout tout en parvenant à créer un univers crédible et cohérent avec des personnages attachants et last but not least un véritable souffle épique.

Concernant le dessin, il permet à la série d'atteindre des sommets. Ce lavis Sépia "Colorex" en couleur directe est à tomber et de bout en bout on sent que Bourgier a tenu le cap, ne lésinant jamais sur les détails. Oui même cette poutre dans l'ombre loin en arrière plan a droit à l'intégralité des nervures du bois dessinées. J'ai particulièrement été bouche bée par son travail sur les ombres projetées et les lumières d'ambiances comme les ciels nuageux. Un dessinateur lent certes, mais quel talent. Si ses originaux n'étaient pas si chers, j'accepterais volontiers de devenir le temps d'un instant, un infâme collectionneur.

On aimerait que la série ne se termine jamais, on aimerait 10 albums comme ceux-là
Un grand moment de lecture