"Sin ilusión", conclusion désabusée, amère même, de "la trilogie de la guerre d'Espagne" de Giardino, est certainement le meilleur des trois livres - le plus rempli d'action, de coups de théâtre, etc. -, mais ne réussit pas non plus à soulever le même enthousiasme de notre part que les débuts de Max Fridman. Malgré les multiples péripéties qui mènent Fridman à la découverte de Treves et du secret de "Cocorito", règne ici une impression d'immobilisme pesant : on a du mal à vibrer même quand les balles sifflent - de manière un peu répétitive d'ailleurs - aux oreilles de notre héros. On peut tenir pour responsable de ce manque de dynamisme le dessin parfait, mais par trop "posé", de Giardino, mais c'est peut-être plutôt l'immobilisme de Fridman, paralysé par ses désillusions (le titre du livre est clair) et par une forme naissante de défaitisme qui passe mal ! ... Et est dans doute antinomique par rapport à un récit policier / d'aventures où l'on doit craindre pour la vie du héros. Ici tout est clairement perdu depuis toujours, la grande Histoire (on sait bien entendu le funeste destin de la jeune République espagnole) comme la petite : la fuite de Fridman devant l'aventure de l'amour qui lui est offerte, même si elle nous offre une jolie conclusion avec ses retrouvailles avec sa fille, n'est pas un grand moment romantique, plus une lâcheté sans aucun panache. On peut comprendre, voire avoir de la sympathie pour le pessimisme (la lucidité) Giardino, mais il est indiscutable qu'il est fatal au charisme de "Max Fridman", le personnage de BD. (C'est d'ailleurs en cela que Giardino est infiniment inférieur à son compatriote Pratt qui réussit au contraire à nourrir le romantisme éperdu des aventures de Corto Maltese du cynisme élégant de son héros...). [Critique écrite en 2016]

EricDebarnot
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le 12 juin 2016

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Eric BBYoda

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